African Connection

Mis en ligne le 09 Mai 2018

Cet article met en lumière une nouvelle donne du narcotrafic : la filière d’Afrique de l’Ouest. L’analyse en explore l’évolution récente et les impacts locaux, en particulier en termes de gouvernance et de sécurité. Face à cette situation, les états africains se mobilisent, avec les limites inhérentes à leurs moyens ou encore avec la réalité encore embryonnaire de la coopération régionale. La dimension maritime de la réponse des états africains au narcotrafic s’avère un point clef pour l’auteure.


Les opinions exprimées dans cet article n’engagent pas le CSFRS.

Les références originales de ce texte sont : Camille Jaulain, «AFRICAN CONNECTION», Cargo Marine, Premier trimestre 2017 – n°8, CESM

Ce texte, ainsi que d’autres publications peuvent être visionnés sur le site du CESMhttp://cesm.marine.defense.gouv.fr/

 


 African Connection

 

Introduction

L’épave d’un Boeing 727-200 retrouvée en 2009 au nord de Gao, au Mali, a révélé une « Mali Connection », et plus généralement, l’emprise du narcotrafic sur le continent africain. « Air Cocaïne »,
en provenance du Venezuela, transportait 10 tonnes de blanche destinées au marché européen… La mondialisation des échanges de biens et de services s’est aussi étendue aux activités illicites à l’instar du trafic de drogues. Les organisations criminelles à l’origine de ces activités sont devenues, au même titre que les firmes, transnationales et s’appuient sur le transport maritime pour convoyer leur production.

La mer des Caraïbes apparaît à cet égard comme l’un des carrefours principaux du narcotrafic. Assurant la liaison entre l’Amérique du Sud et du Nord, sa connexion avec l’océan Atlantique offre un accès à l’Europe et à l’Afrique de l’Ouest. Un atout dont les narcotrafiquants sont bien conscients au regard des quantités de drogue saisies dans la zone.

En novembre 2016, la frégate française Germinal intercepte ainsi 780 kg de cocaïne pure à 110 milles nautiques au nord de la péninsule de la Guajira, en Colombie[1]. Depuis janvier 2016, les services français ont saisi plus de 5,6 tonnes de produits stupéfiants en mer des Antilles. Des quantités considérables destinées aux continents nord-américain et européen, les deux plus gros marchés consommateurs de stupéfiants.

La production de coca est concentrée dans les trois pays de la cordillère des Andes (Colombie, Bolivie et Pérou). Son dérivé, la cocaïne, atteint ensuite le marché nord-américain via le Pacifique et les Caraïbes après avoir transité par le Venezuela et l’Équateur. Ces mêmes pays, ainsi que le Brésil, servent de plateforme d’acheminement pour le Vieux Continent. La marchandise transite ensuite par les Antilles d’où elle est acheminée par voie aérienne ou maritime jusqu’au Cap-Vert, à l’Espagne ou au Portugal.

Toutefois, la géopolitique du narcotrafic à l’échelle mondiale est redessinée. Une nouvelle route de transit et de redistribution est apparue à l’orée du XXIe siècle : l’Afrique de l’Ouest. Caractérisée par des pays aux structures étatiques quelquefois fragiles voire déliquescentes, elle est rapidement devenue une opportunité pour des narcotrafiquants confrontés à des difficultés d’acheminement croissantes sur la voie Antilles-Europe.

Cette problématique concerne une zone composée de 18 États allant de la Mauritanie jusqu’au Gabon et touche principalement les pays du golfe de Guinée (Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin, Nigéria, Cameroun) ainsi que ceux de la façade atlantique (Cap-Vert, Sénégal, Gambie[2], GuinéeBissau, Guinée, Sierra Leone et Liberia). Toutefois, cette région n’est que la partie émergée de l’iceberg. Certains pays enclavés de l’Afrique subsaharienne (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad) sont également touchés par le narcotrafic devenant voie d’acheminement vers l’Europe. Cette mutation de la région en zone rebond est avérée, aussi bien par les saisies effectuées en mer que les arrestations de passeurs sur les vols commerciaux en direction du Vieux Continent. Bien que la palette des drogues offre un large éventail de choix, cette étude restera concentrée sur le trafic de cocaïne qui demeure à ce jour la principale substance illicite saisie en mer et à destination de l’Afrique de l’Ouest[3].

Après avoir analysé l’émergence de l’Afrique de l’Ouest comme pôle international du narcotrafic, nous nous intéresserons aux instruments internationaux mis en place pour le combattre avant, devant les limites de ces initiatives, de nous pencher sur la coopération sous-régionale africaine, seule réponse susceptible d’enrayer ce phénomène.

1. L’Afrique de l’Ouest, terre de conquête du narcotrafic

Depuis le début des années 2000, le marché du narcotrafic a été bousculé par l’émergence d’une route européenne partant du Venezuela ou du Brésil et transitant par l’Afrique de l’Ouest[4]. Loin d’être cantonnée à une simple porte d’entrée de la drogue, l’Afrique de l’Ouest a développé son propre marché, de production comme de consommation, et s’inscrit depuis comme un nouvel acteur de ce commerce illégal.

1.1 La liaison Caraïbes-Afrique de l’Ouest, nouvelle route maritime de la drogue

Un changement d’itinéraire réfléchi et opportun

Longtemps concentré autour de la région caribéenne, le trafic de cocaïne ne connaît désormais plus de frontières et se mondialise. La globalisation joue un rôle moteur dans l’expansion de ce commerce illégal qui touche depuis une dizaine d’années le continent africain.

Comment expliquer ce phénomène ? À la volonté des narcotrafiquants de conquérir de nouveaux marchés s’ajoutent un certain nombre de raisons d’ordre pratique. La situation géographique du continent africain est perçue comme offrant un point de passage naturel entre l’Amérique du Sud et l’Europe. À cet égard, le nombre important de saisies réalisées par les marines espagnole et britannique autour du dixième degré de latitude nord est à l’origine de la célèbre appellation « autoroute 10 » pour désigner la route maritime empruntée. Le renforcement des contrôles des aéroports et des ports de l’Union européenne a, en outre, refroidi les trafiquants latino-américains dans la quête d’un acheminement direct des stupéfiants.

Le manque de stabilité chronique des pays de l’ouest africain favorise enfin la prolifération d’États « faillis » dans lesquels l’appareil étatique ne parvient plus à faire valoir ses moyens de coercition. De nombreux États africains sortent par exemple d’une période de guerres civiles (dans les années 1990 pour la Sierra Leone et le Liberia et au début des années 2000 pour la Côte d’Ivoire) quand d’autres sont toujours victimes de violences armées et/ou de conflits politiques. À l’instar de la Guinée-Bissau qui, depuis son indépendance en 1974, a subi jusqu’à neuf coups d’État ou tentatives de coups d’État, dont un dernier en 2012. Une instabilité accentuée par l’actuel président José Mario Vaz qui a limogé ses deux premiers ministres au cours de l’année 2015 et l’intégralité de son gouvernement en mai 2016.

État de « la menace » du narcotrafic

Évaluer le degré du narcotrafic est un exercice délicat puisque son estimation repose uniquement sur les quantités de drogue interceptées. Selon les Nations unies, depuis 2004, les saisies annuelles de cocaïne sur l’ensemble du continent africain ont dépassé les 2,5 tonnes alors qu’entre 1998 et 2003, elles s’élevaient en moyenne à 0,6 tonne[5]. Rien qu’entre janvier et septembre 2007, environ 5,7 tonnes de cocaïne ont été saisies en Afrique, dont 99 % en Afrique de l’Ouest[6]. Si, depuis 2008, les études ont tablé sur une plus faible intensité du narcotrafic dans la région du fait de la baisse des quantités de drogues interceptées[7], il s’avère que les chiffres transmis à l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) ne reflétaient pas la réalité.

L’absence de rapports de saisies dans certains pays africains conjuguée à la faiblesse des capacités opérationnelles de ces derniers dans la détection et a fortiori l’interception des colis illicites masqueraient en partie l’ampleur du phénomène.

D’après le rapport de l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) publié en février 2012, « les trafiquants ont simplement modifié leur modus operandi et trouvé de nouvelles méthodes pour faire transiter la cocaïne par l’Afrique de l’Ouest » venant ainsi confirmer « un nombre croissant de saisies importantes[8]».

Le dernier rapport rendu par l’ONUDC en 2016 indique qu’au moins 22 tonnes de cocaïne ont été saisies « en route » de l’Amérique latine à destination de l’Europe via l’Afrique de l’Ouest sur la période de décembre 2014 à mars 2016[9].

La hausse des quantités de drogues envoyées trouve son corollaire dans la multiplication des portes d’entrée sur la façade atlantique de l’Afrique. Si le trafic aérien est important, singulièrement au Mali, la voie maritime est privilégiée puisqu’elle offre une grande capacité d’export et de dissimulation. Les saisies effectuées au large peuvent être regroupées en deux pôles majeurs : d’un côté les côtes guinéennes, l’archipel du Cap-Vert, le Sénégal et la Sierra Leone, de l’autre la baie du Bénin (Ghana, Togo, Bénin, Nigéria et Cameroun) où sont présents les gangs nigérians. L’éparpillement de ces points d’entrée permet aux narcotrafiquants de brouiller les pistes et d’essaimer les volumes en vue de réduire les pertes.

À l’inverse des Caraïbes, parsemées de nombreuses îles faciles à relier par go-fast, l’Afrique de l’Ouest fait face à l’étendue océanique. Les trafiquants latino-américains ont donc privilégié d’autres vecteurs. Les navires-mères, dans un premier temps, avec transbordement sur de petits bateaux côtiers et désormais les slow-movers. Les voiliers, bateaux de pêche, cargos et autres navires marchands ont en effet l’avantage d’offrir de multiples caches pour dissimuler la drogue : faux plafonds, faux planchers, doubles fonds, intérieur des quilles, circuits d’aération[10]

Une fois stockée dans les pays côtiers, la drogue doit être acheminée en Europe. Trois modes d’acheminement existent : par voie maritime, où sont sollicités aussi bien le plaisancier que le navire de commerce, aérienne ou terrestre. Ces deux dernières composent l’essentiel des trafics de drogues en partance d’Afrique pour l’Europe.

La porosité des frontières entre Afrique de l’Ouest et Sahel, couplée à la libre circulation des biens et des personnes au sein de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) permet aux narcotrafiquants d’acheminer la drogue quasi-librement jusqu’en Afrique du Nord (pays du Maghreb et Libye).

Le Mali est un exemple parmi tant d’autres. Situé au cœur du réseau transsaharien, le nord du pays, notamment du fait d’une instabilité chronique, a vu transiter la majorité de la drogue en provenance de la Guinée-Bissau et de la Guinée-Conakry vers le Maghreb. Toutefois, l’opération militaire française Serval, dirigée contre les groupes terroristes d’AQMI, est venue déstabiliser cette route de la drogue et les trafiquants africains ont dû trouver un nouvel itinéraire. Partant du Ghana et du Burkina Faso, la drogue transiterait désormais par le sud-Mali avant de gagner la Guinée et le Sénégal[11] d’où elle est réexpédiée…

1.2 L’Afrique de l’Ouest, nouvelle terre fertile de la drogue

Un marché de consommation émergent à l’origine d’une production locale

Jusque-là réservées aux milieux aisés, les drogues touchent désormais la plupart des couches sociales. « On assiste à une véritable explosion du phénomène : à l’usage généralisé parmi la jeunesse des solvants, du cannabis et des psychotropes, s’ajoute la progression de l’héroïne, de la cocaïne et l’apparition du crack[12] ». Cette croissance est en partie due à l’émergence d’une classe moyenne dotée d’un véritable pouvoir d’achat[13], les pays comme la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Sénégal, le Cameroun et le Nigéria sont dans une dynamique de développement et apparaissent aux yeux des trafiquants comme un marché potentiel…et une zone de production.

La fabrication de drogues de synthèse sur le sol africain semble un fait établi : après la découverte d’un premier laboratoire en Guinée Conakry en 2009, dix ont été démantelés dans le sud du Nigéria entre 2011 et juillet 2015[14] : « L’Afrique de l’Ouest semble être devenue une source établie de la méthamphétamine[15] ». Selon le secrétaire général de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), « en Asie, 50% de la méthamphétamine saisie est venue d’Afrique, utilisant l’Europe comme lieu de transit[16] ». Cette apparition d’une Afrique consommatrice et productrice de drogue est facilitée par un terreau propice à l’épanouissement de la corruption.

« Dans bien des États africains en proie aux difficultés de la démocratisation, de l’ajustement structurel ou des conflits armés s’est dessinée une tendance à la criminalisation du politique et de l’économique[17] ». Il n’est pas rare de constater des connivences entre les trafiquants et des personnes à la tête de l’État ou au sein de l’armée. Ces derniers collaborent au commerce de la drogue constituant ainsi un maillon de la chaîne dans la redistribution des produits illicites.

Vers la création de narco-États ?

L’émergence de l’Afrique de l’Ouest comme zone de transit et de redistribution de la drogue associée à l’imprégnation de la corruption au sein de certains pouvoirs suscite des inquiétudes au sujet de l’apparition pérenne de narco-États. L’exemple le plus notoire est celui de la Guinée-Bissau qui serait devenue une sorte de « gang-land »[18]. Les révélations relatives à l’implication de l’ancien chef de la marine guinéenne, Bubo Na Tchuto, dans un trafic de cocaïne avec la Colombie illustrent la profondeur du mal. Arrêté en mer en 2013 par les agents américains de la Drug Enforcement Administration (DEA), il a été relâché par la justice américaine et a regagné le pays en octobre 2016. Dès son retour, il a adressé au président une demande de réintégration au sein de l’armée… Ce cas est loin d’être isolé en Afrique de l’Ouest.

La pénétration du narcotrafic s’explique par les sommes générées par le trafic de drogue, parfois plus élevées que le PIB des États. À ce titre, en 2010, le budget militaire du Togo était de 56,8 millions de dollars, celui du Ghana de 125 millions de dollars, quand une tonne de cocaïne se revendait autour de 85 millions de dollars[19]. « La cocaïne est en effet le produit qui génère le plus de valeur ajoutée au monde »[20]. Sa chaîne de valeur l’illustre bien : ainsi, en 2014, 1 kg de cocaïne acheté entre 2 700 et 4 000 dollars dans la zone de production s’échangeait à plus de 13 000 dollars dans les villes côtières ouest-africaines, 16 000 dollars dans les villes sahéliennes, entre 24 000 et 27 000 dollars en Afrique du Nord et enfin entre 40 000 et 60 000 dollars en Europe.

Un cercle vicieux s’est ainsi créé : l’instabilité de la région a participé à son choix par les narcotrafiquants, la participation d’individus de haut rang dans le réseau vient alimenter un peu plus cette insécurité tout comme les groupes armés qui prospèrent sur cette manne. À l’instar des FARC colombiennes avant la signature de l’accord de paix en novembre 2016 ou encore du Sentier Lumineux au Pérou, le groupe terroriste AQMI, antenne d’Al-Qaïda au Mali, le MUJAO (Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest) ou encore Boko Haram au Nigéria utilisent les
« revenus » émanant du narcotrafic comme moyen de financement de leurs luttes. Trafiquants, État, groupes criminels et terroristes sont tous liés par le commerce illégal de la drogue et participent à la déstabilisation de l’Afrique de l’Ouest.

2. Un réveil de l’Afrique de l’Ouest dans la lutte contre le narcotrafic ?

Malgré des moyens réduits, les États africains tentent depuis quelques années d’apporter un début de réponse. Leur engagement s’illustre notamment par la mise en place de cadres législatifs réprimant le narcotrafic ainsi que par le renforcement de leurs forces navales. Mais sans mutualisation des moyens, coordination et appui extérieur, la lutte risque de rester vaine.

2.1 L’engagement africain dans la répression du trafic de stupéfiants

Des cadres juridiques disparates

La répression du narcotrafic s’est dans un premier temps manifestée au niveau juridique. L’adhésion de la plupart des États de la zone à la Convention de Vienne de 1988 en est un premier indicateur. Toutefois, cette réglementation internationale demeure limitée : la primauté des droits de l’État du pavillon perdure et continue en l’espèce de servir les intérêts des narcotrafiquants. Surtout, cette réglementation semble très loin de la situation africaine. C’est la raison pour laquelle quelques rares initiatives étatiques ont été lancées.

Le géant nigérian est, par exemple, l’un des pays les plus avancés en matière d’encadrement du commerce illégal de stupéfiants. En 2004, une loi anti-drogues, le National Drug Enforcement Agency Act, a été promulguée. Celle-ci « criminalise toute espèce d’activité liée à la production, la transformation, la distribution, la vente, l’usage et la dissimulation de drogues illicites[21] » avec des peines allant de 15 ans d’emprisonnement à la perpétuité. En plus d’établir des sanctions conséquentes, cette loi a créé l’Agence nationale de contrôle de l’application de la loi sur les drogues (NDLEA). Un organe chargé à la fois de faire appliquer la loi et habilité à enquêter sur les personnes soupçonnées. Le Ghana fait également partie des États qui ont œuvré pour la répression du narcotrafic. Dès 1990, il a adopté une Loi de contrôle et de répression des stupéfiants et renforcé son dispositif en 2012 avec l’adoption de la loi Criminal Offences. Sur le même modèle que le Nigéria, le Ghana applique des sanctions pouvant aller de 15 ans d’emprisonnement à la perpétuité. Par ailleurs, cette loi de 1990 a établi le Narcotics Control Board (NACOB) dont la mission est de coordonner les efforts de lutte des différentes agences chargées de la répression des drogues. Enfin, le Mali a adopté en 2001 une loi portant sur le contrôle des drogues et des précurseurs. La détention, l’usage, la vente, le trafic et la production sont condamnés par cette dernière qui établit trois classifications de sanctions selon que les substances sont destinées ou non à un usage médical.

Cependant, l’augmentation des saisies de stupéfiants dans ces trois pays prouve que les cadres législatifs instaurés sont insuffisants, ou tout du moins inadaptés, à la situation actuelle. Un élément notamment fait défaut : des accords de délimitations maritimes. Bien qu’une évolution puisse être constatée dans la résolution des différends avec le programme Frontières de l’Union africaine[22], des litiges subsistent, notamment entre le Ghana et la Côte d’Ivoire. L’existence de ces « zones grises » est une aubaine pour les trafiquants qui bénéficient en outre du sous-équipement des marines de la zone.

Le nouveau visage des forces navales africaines

Le contexte actuel d’insécurité maritime a poussé les États africains à renforcer leurs marines. Consciente de ses ressources marines insuffisamment exploitées et de la nécessité de se connecter aux grands réseaux d’échanges mondiaux, la région a aujourd’hui la volonté de faire de son espace maritime un levier de développement économique. Mais les menaces constituées par la piraterie, la pêche illégale ou encore le narcotrafic nuisent à sa sûreté. De plus, la récente modernisation des ports africains (Tema au Ghana, Lomé au Togo ou encore Kribi au Cameroun) pourrait avoir pour conséquence de rendre les trafics de stupéfiants plus aisés. En effet, comme il a été vu précédemment, la majorité des drogues est acheminée par porte-conteneurs qui restent stationnés dans les grands terminaux portuaires. Ce qui implique la nécessité de mettre en place un plus large dispositif de surveillance et de sécurité.

Le Nigéria et la Guinée-Équatoriale ont, par exemple, développé leurs forces navales. Le premier possède, en 2016, trois frégates lance-missiles, huit bâtiments de combat littoral, une dizaine de
patrouilleurs de haute mer et deux bâtiments anti-mines. Le second peut s’appuyer sur une frégate en service depuis 2014, quatre patrouilleurs de haute mer ainsi qu’un bâtiment de débarquement de chars[23].

D’autres pays, tels que le Sénégal, le Togo et le Cameroun, se sont tournés vers leurs partenaires occidentaux pour renouveler leurs moyens. Le Sénégal a réceptionné en 2013 son patrouilleur Ferlo, conçu et fabriqué par les chantiers navals français Raidco Marine et Ufast[24], et a admis successivement au service actif en 2015 et 2016 les patrouilleurs de haute mer Kedougou et Fouladou. Le Togo, quant à lui, a reçu en mars 2014 et en juillet 2014 deux nouveaux patrouilleurs légers fabriqués également par les deux constructeurs précédemment cités[25]. La Côte d’Ivoire figure également parmi les plus proches partenaires de la France. Le groupe Raidco Marine a livré, depuis juin 2014, trois patrouilleurs légers à la marine ivoirienne[26] sous les noms respectifs d’Émergence, Bouclier et Sékongo. De même, le chantier Sillinger a vendu en octobre dernier 16 semi-rigides à l’unité d’intervention de la gendarmerie et des forces spéciales locale[27]. L’ensemble de ces moyens, et plus particulièrement les patrouilleurs de type RPB 33 commandés par ces trois pays[28], sont parfaitement adaptés aux missions de surveillance, d’intervention et d’inspection afin de lutter contre toute source d’insécurité maritime. D’autres pays comme le Cameroun ont fait appel à la Chine pour moderniser leur flotte. Ainsi, le pays a acquis en 2014 deux nouveaux patrouilleurs, le Ntem et la Sanaga. Ce dernier devrait également recevoir l’ancien patrouilleur Grèbe acheté auprès de la Marine française début mars 2017[29].

L’acquisition de tels équipements atteste de la volonté des États africains de se préoccuper de la sécurisation de leurs espaces maritimes. Reste que le soutien étranger demeure, pour l’heure, incontournable pour accompagner les marines africaines dans leur combat.

2.2 Un soutien international et l’appui français

L’Afrique de l’Ouest est soutenue dans sa lutte par de multiples organisations multilatérales : l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’Union européenne à travers le programme CRIMGO et aujourd’hui GoGIN, Interpol… À côté de ces actions multilatérales, la France joue dans la zone un rôle actif qui ne se limite pas à la problématique narcotique mais couvre tout le spectre de la sécurité maritime.

Sa capacité d’intervention permanente s’apprécie notamment au regard des forces prépositionnées au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon ainsi qu’au large du golfe de Guinée à travers l’opération de sécurisation maritime Corymbe. Le bâtiment engagé pour cette mission assure une présence dissuasive et contribue ainsi à limiter le narcotrafic dans la zone.

Plusieurs interceptions prouvent la pertinence de l’action française dans ces eaux. Ainsi, en janvier 2008, la Marine nationale a arraisonné un bateau de pêche battant pavillon libérien à 500 km au large de Monrovia dont l’équipage venait de jeter à la mer des bidons contenant près de 2,5 tonnes de cocaïne[30]. Près d’un mois plus tard, elle intercepte un cargo panaméen au large de la Guinée dont les membres avait jeté par-dessus bord plus de 3 tonnes de cocaïne. La réussite de ces interventions repose sur un renseignement, décisif dans cette lutte. Historiquement porté par l’OCRTIS (Organisme de contrôle et de répression du trafic de stupéfiants)[31], structure interministérielle chargée d’opérer la centralisation des renseignements pouvant faciliter la recherche et la prévention du narcotrafic, il s’est depuis internationalisé. En 2007, en effet, à l’initiative de la France, sept pays européens (Espagne, Irlande, Italie, Pays-Bas, France, Portugal et Royaume-Uni) ont signé l’accord MAOC-N (Maritime Analysis and Operations Centre – Narcotics). Un centre international voué à la mutualisation et à l’analyse du renseignement recueilli par les États parties a vu le jour dans ce cadre à Lisbonne. Focalisée exclusivement sur les flux atlantiques destinés à l’Europe et à l’Afrique de l’Ouest, cette structure répond à l’ampleur récente du marché de la cocaïne sur le sol européen et prolonge la lutte contre le narcotrafic engagée dans les Caraïbes et en Afrique. Plus récemment, en 2009, deux plateformes de renseignement africaines ont été créées en 2009 à Dakar (Sénégal) et à Accra (Ghana) au sein desquelles des officiers de liaison de l’UE coopèrent à des projets de renforcement des capacités de prévention et de répression antidrogue.

La Marine nationale incarne ici le bras-armé de ces dispositifs de surveillance du narcotrafic. Cependant, les forces françaises ne se limitent pas seulement à des missions coercitives. Elles jouent un rôle important dans la coopération et la formation des marines de la région. C’est par la transmission de ses savoir-faire que la Marine se différencie des autres intervenants. Ce soutien porté par la Direction de coopération de sécurité et de défense (DCSD) s’inscrit dans le projet d’appui à la réforme du système de sécurité maritime dans le golfe de Guinée, dit ASECMAR, mis en place en 2011 pour une durée de 4 ans. Destiné à six États (Bénin, Ghana, Togo, Guinée Conakry, Côte d’Ivoire et Nigéria) et à la CEDEAO[32], ce projet a pour objectif de former à l’action de l’État en mer les agents de services agissant en mer ou sur la frange du littoral et de renforcer la coopération régionale existante. Par ailleurs, la DCSD a également appuyé la création de l’École nationale à vocation régionale (ENRV) à Bata, en Guinée-Équatoriale qui forme notamment les sous-officiers et les officiers des forces navales africaines. Le sommet de l’Élysée sur la paix et la sécurité en Afrique de décembre 2013 a apporté une nouvelle pierre à l’édifice, décidant la création d’un collège « action de l’État en mer » en Côte d’Ivoire. Inauguré en septembre 2015 sous le nom d’Institut de sécurité maritime interrégionale (ISMI), il vise à étendre l’ASECMAR à l’ensemble des pays du golfe de Guinée. Il réunit à ce jour quinze États du golfe de Guinée ainsi que les deux organisations sousrégionales (CEEAC[33] et CEDEAO).

Au niveau pratique, la formation des marines locales se réalise à travers les exercices NEMO (Navy’s Exercise for Maritime Operations) organisés par la Marine nationale depuis 2013.

Ces manœuvres multilatérales regroupent les unités des pays riverains pour les soumettre à divers scenarii d’entraînement[34]. Elles visent à améliorer la coordination des marines entre elles et les centres de commandement. Les bâtiments déployés dans le cadre de la mission Corymbe reçoivent à bord les marins et les élèves africains. Le dernier exercice NEMO 16.5 date de septembre 2016 et a notamment mobilisé les unités du Nigéria, du Gabon, du Cameroun, du Bénin, du Togo, du Ghana et de Guinée-Équatoriale autour du BPC Dixmude et du patrouilleur de haute mer le Commandant Ducuing.

La formation commune des forces africaines a pour corollaire la solidarité avec le développement d’une coopération sous-régionale.

2.3 L’émergence d’une coopération sous-régionale africaine, un impératif à l’ampleur du narcotrafic

Récemment, les États d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale ont décidé de se rassembler pour lutter mutuellement contre le narcotrafic. Ce combat s’inscrit plus largement dans le développement d’une stratégie globale de sûreté et de sécurité maritimes déclinée depuis 2013 à travers de multiples initiatives régionales. En 2008, les chefs d’État des quinze pays membres de la CEDEAO adoptent ainsi une Déclaration politique et un Plan d’action régional par lesquels ils s’engagent à lutter contre le trafic de stupéfiants dans la sous-région. Cette déclaration marque le point de départ d’un long processus de coopération qui peut s’appuyer sur les résolutions 2018 (2011) et 2039 (2012) du Conseil de sécurité des Nations unies qui appellent à la coopération et au renforcement des capacités de surveillance, d’intervention et de répression des États du golfe de Guinée.

Ces déclarations ont amorcé le début d’une ambitieuse coopération interrégionale. Le Sommet de Yaoundé, en 2013, a ainsi regroupé les trois communautés régionales de l’Afrique de l’Ouest (la CEDEAO, la CEEAC et le CGG[35]) qui se sont entendues pour adopter trois documents constitutifs du « processus de Yaoundé ». Le premier est un code de conduite pour la lutte contre l’insécurité maritime comparable à celui de Djibouti ; le second, une déclaration des chefs d’État s’engageant à renforcer conjointement leur coopération et le dernier, un memorandum d’entente entre les trois organisations. Ce texte est le point d’orgue de la coopération interrégionale puisqu’il crée une nouvelle architecture de sûreté et de sécurité maritimes avec, à son sommet, un nouvel organe, le Centre interrégional de coordination (CIC). La construction, complexe, est résumée dans le schéma cidessous[36]
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Plusieurs niveaux composent cette coopération : au niveau local, les Centres des opérations maritimes (COM) nationaux répartis en différentes zones dont la gestion revient aux Centres multinationaux de coordination (CMC) ; au niveau régional les Centres régionaux de sécurité maritime et enfin, à l’échelle interrégionale, le CIC. Celui-ci incarne le point névralgique de l’architecture. Son rôle est avant tout de développer un cadre stratégique unique où la coordination, la coopération, l’interopérabilité et la mutualisation sont les maîtres-mots. Ces opérations touchent à des domaines variés : harmonisation des législations, régionalisation des moyens, actions de formation et d’entraînement, collecte et partage de l’information. L’idée peine néanmoins à se concrétiser : si le CRESMAO a ouvert au second semestre 2016, la majorité des CMC ne sont toujours pas effectifs à ce jour (à l’exception de deux : ceux de la zone D et de la zone E). De manière plus générale, le manque de ressources, autant financières que matérielles, couplé à une formation lacunaire du personnel ainsi qu’à une concurrence entre les structures (CIC, CGG et OMOAC)[37] menacent l’effectivité des structures institutionnelles. Par ailleurs, le Code de conduite, signé en 2013, n’est toujours pas devenu contraignant.

Le Sommet de Lomé (Togo) qui a eu lieu du 10 au 15 octobre 2016 a tenté de remédier à l’enlisement du processus de Yaoundé. S’inscrivant toujours dans une perspective de sûreté et de sécurité maritimes, le sommet avait pour principal objectif l’adoption d’une charte africaine contraignante visant à concilier la coordination des interventions étatiques en mer avec les objectifs du développement économique et social. Elle entre ainsi dans le champ de la Stratégie africaine intégrée pour les mers et les océans à l’horizon 2050 (Stratégie AIM 2050). Deux nouveautés apparaissent : sa portée continentale ainsi que son volet préventif pour décourager en amont la piraterie et toutes formes de criminalité en mer, dont le narcotrafic[38]. Bien qu’elle n’ait été signée que par 31 pays africains sur 52 pays présents (les pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe comptent pour beaucoup parmi ceux qui ne l’ont pas signée), cette charte « historique »[39] devra recevoir 15 ratifications pour entrer en vigueur.

Conformément à l’article 17§9[40] de la Convention de Vienne, les États africains ont choisi d’approfondir le cadre de coopération de leur lutte. Sur le même schéma que l’accord d’Aruba de 2003 pour la mer des Caraïbes, la signature du Code de conduite relatif à la prévention et à la répression des actes illicites perpétrés en Afrique de l’Ouest et du Centre, dit de Yaoundé, en 2013, et de la Charte sur la sûreté et la sécurité maritimes à Lomé préfigurent la mise en place d’une coopération africaine. Cependant, l’absence de force contraignante pour le premier[41] et l’attente d’application du second font de l’espace atlantique africain une zone toujours permissive où les narcotrafiquants sont libres de mener leur activité illégale comme bon leur semble.

Dès lors, la réussite de ce nouveau système demeure entièrement liée au bon vouloir des États de l’Afrique de l’Ouest qui semblent peu enclins à coopérer entre eux, et ce, en dépit du soutien apporté par les organisations et puissances extérieures. L’origine de cette solidarité défaillante se trouve dans les profils des États qui demeurent trop disparates. On retrouve ainsi des systèmes juridiques différents quand la législation réprimant le narcotrafic est existante, certains États qui n’ont toujours pas défini de stratégie maritime et entretiennent des rapports conflictuels au sujet de leurs délimitations maritimes et enfin des clivages linguistiques (pays anglophones, francophones et lusophone) qui ne cessent de complexifier les rapports.

Conclusion 

La sécurité et la sûreté maritimes sont les nouveaux enjeux rencontrés par l’Afrique de l’Ouest. La région est, par son ouverture sur l’océan Atlantique, prédisposée à affronter les menaces venues des mers (piraterie, trafic d’armes, d’êtres humains, de drogue et la pêche illégale). Longtemps jugées peu problématiques, ces menaces ont pu se développer et s’y ancrer. L’absence d’un dispositif de sécurité efficace associé à des systèmes juridique et coercitif défaillants font de l’Afrique de l’Ouest une zone idéale de prolifération des activités dites criminelles. De ce fait, jamais le narcotrafic n’a été aussi prégnant… De même, le Golfe de Guinée est aujourd’hui considéré comme le nouvel épicentre de la piraterie : durant le premier semestre 2016, plus de 44 kidnappings ont été recensés[42] au lieu de 10 sur la même période en 2015.

À l’heure où le sommet de Lomé a démontré que l’Afrique voulait faire de son espace maritime un levier de développement économique et social, la lutte contre ces menaces est cruciale. Le souhait de développer ses ports en vue de les rendre plus attractifs et compétitifs dans le commerce mondial ne pourra se faire qu’avec une plus grande sécurisation terrestre et maritime de la région. L’émergence d’une coopération sous-régionale africaine, avec le processus de Yaoundé et récemment la Charte de Lomé, illustre la volonté de la région d’assurer par elle-même la sûreté et la sécurité de son espace maritime. Si cette prise en main doit être saluée, elle demeure encore aujourd’hui trop soumise au bon vouloir des États. Autant les financements que le personnel dépendent de ces derniers qui semblent parfois peu enclins à s’allier et à coopérer. Dès lors, c’est tout d’abord au niveau des États qu’une réponse ferme et efficace pourra être apportée dans la lutte contre l’insécurité maritime.

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