La France, un challenger majeur de l’espace militaire

Mis en ligne le 21 Fév 2019

Cet article dresse un état des lieux de la place et de l’action de la France dans le domaine du spatial. Paris reste, selon l’auteur, une puissance spatiale militaire de rang intermédiaire qui néanmoins déploie des efforts importants et dispose de nombre d’atouts face aux défis à venir.

 


Les opinions exprimées dans cet article n’engagent pas le CSFRS.

Les références originales de ce texte sont: “La France, un challenger majeur de l’espace militaire” de Vincent Satgé.

Ce texte, ainsi que d’autres publications, peuvent être consultés dans l’ouvrage Conflictualités modernes et postures de défense


“Quiconque contrôle le point haut de l’espace contrôle le monde”. L’Empire romain contrôlait le monde parce qu’il pouvait bâtir des routes. Plus tard, l’Empire britannique dominait grâce à sa marine. À l’ère de l’aéronautique, nous étions puissants car nous avions l’avion. Et maintenant les communistes ont déjà un pied dans l’espace. Très bientôt ils auront des satanées plateformes spatiales du haut desquelles ils nous jetteront des bombes nucléaires sur la tête. » Ces mots, attribués à Lyndon Johnson, alors vice-président des États-Unis, dans le film L’Étoffe des héros[1], traite du programme Mercury, c’est-à-dire celui des premiers vols habités américains hors de l’atmosphère. Il souligne aussi combien l’espace a été associé, dès les débuts de son exploration, à une perspective de défense et de sécurité nationale. De fait, pendant les premières décennies de l’aventure spatiale, qui coïncident avec celles de la Guerre froide, l’enjeu spatial a essentiellement été stratégique (démonstration de puissance, renseignement), ce qui lui a permis de mobiliser les immenses fonds nécessaires. On peut imaginer qu’une capacité spatiale uniquement civile aurait été beaucoup plus longue à émerger. Pour autant, ces années 1960 et 1970 ont aussi été marquées par de grands programmes civils (exploration lunaire et du système solaire, laboratoires orbitaux) mais dont la motivation a souvent été nourrie par la rivalité entre les deux grands blocs Est et Ouest. Ainsi, le programme lunaire s’interrompt rapidement après que la course à la Lune a été gagnée par les États-Unis. Par ailleurs, si les stations spatiales américaine (Skylab) ou soviétique (Saliout) sont popularisées pour leur utilisation scientifique, on ne peut pas écarter le fait qu’elles ont aussi eu une destination militaire, directe ou indirecte. Pendant ce temps, le nombre et la performance des satellites militaires s’accroît avec des capacités de plus en plus efficaces d’« espionnage spatial ». Si elles permettront à leurs détenteurs d’asseoir leur puissance, il faut reconnaître qu’elles constitueront aussi un facteur d’équilibre international et de détente en servant d’outils de contrôle des accords de désarmement SALT[2] de ces années 1970.

L’espace militaire prend une nouvelle dimension au début des années 1980 avec l’Initiative de défense stratégique (SDI[3]) de Ronald Reagan. Rendue publique en 1983, elle fut immédiatement baptisée « guerre des étoiles » pour sa coïncidence avec la sortie d’un film célèbre du même nom[4]. L’objectif de la SDI était double : d’abord, compléter le dispositif de dissuasion nucléaire par un système de prévention d’une agression soviétique mais, aussi, utiliser la puissance technologique américaine pour mettre à genoux l’URSS. Pour cela, le projet envisageait de développer une parade multi-sectorielle aux vecteurs balistiques soviétiques avec un bouclier anti-missile s’appuyant sur des moyens de détection, d’alerte et d’interception reposant pour beaucoup sur des capacités spatiales. La SDI a bien eu deux effets dont effectivement celui de surprendre une Union soviétique en déliquescence, économiquement, incapable de relever le défi posé et handicapée par un budget de défense représentant quelque 30 % de son produit intérieur brut. Elle généra aussi la crainte de rompre un équilibre fragile de la dissuasion, peur qui ne se limita pas à l’URSS mais gagna les alliés des États-Unis qui y virent également un risque de trop grande dépendance au nouveau parapluie américain. Finalement, la chute du pacte de Varsovie freina fortement le dispositif et l’ambition américaine se limita à quelques éléments de défense. Toutefois, l’idée d’une défense anti-missile, largement basée sur le spatial, ne fut jamais abandonnée et reprit de la vigueur avec la vision technologique de la Revolution in the Military Affairs des années 1990 et le besoin de réponses, depuis les années 2000, aux Rogue States dont les capacités balistiques proliféraient. Les opérations militaires de la fin du XXe siècle et du début du suivant accélérèrent le recours à l’espace qui ne se limita plus aux seules activités de renseignement (observation dans différents domaines de fréquences : optique, infrarouge, radar ; écoute) mais permit d’accueillir des constellations de satellites de géolocalisation (GPS), de communication ou d’alerte avancée. Progressivement, le champ spatial est devenu un milieu à part entière de l’action militaire et plus aucune opération ne saurait se passer de ce segment dont les armées sont fortement dépendantes. Si l’arsenalisation de l’espace n’est pas de mise, un traité international de 1967 interdisant à ses signataires d’y installer des armes de destruction massive, sa militarisation est aussi ancienne que son exploration et va croissante au fur et à mesure que de nouvelles nations y accèdent. En février 2018, le Pentagone avouait que « Les États-Unis sont dépendants de l’espace et nos adversaires le savent » et que, compte tenu du fait que « La Russie et la Chine ont pour objectif d’avoir des armes contre-spatiales non destructives et destructrices disponibles pour un futur conflit potentiel », un prochain conflit mondial pourrait débuter dans l’espace[5]. Cela incita Heather Wilson, la secrétaire à la Force aérienne des États-Unis, à souligner que le pays se devait d’« organiser et entraîner des forces capables de triompher dans n’importe quel type de conflits futurs qui s’étendraient à l’espace » et le Président Donald Trump de lancer une véritable Space Force, présentée comme la 6e armée américaine.

Cette réflexion du ministère de la Défense américain souligne que l’espace stratégique ne se limite pas aux satellites militaires. Aujourd’hui, les sociétés modernes sont entièrement dépendantes de l’espace (systèmes économiques, industriels, bancaires mais aussi sociaux ou de santé, etc.) et leur résilience résulte en grande partie de la robustesse de leurs capacités spatiales (géolocalisation, communications, transfert de données, météorologie, etc.). La prolifération de dispositifs orbitaux est là pour témoigner de cette grande dépendance. Plus de 1 200[6] satellites sont en service sur 4 300 qui ont été lancés depuis le début de l’ère spatiale et qui sont toujours en orbite[7]. La moitié de ces satellites opérationnels est civile, un tiers d’entre eux est à usage strictement militaire et le reste à destination majoritairement civile mais potentiellement militaire. L’espace, en particulier dans ses orbites basses (premières centaines de kilomètres), est donc très sollicité sinon encombré avec des satellites parfaitement identifiés dans leur mission civile ou militaire mais dont un certain nombre a un usage double. La cartographie de l’espace « militaire » comporte donc une part d’incertitude qui oblige à considérer tout satellite comme un vecteur de puissance militaire. Ainsi, tout objet orbité peut générer des effets militaires par les perturbations qu’il peut causer (interférences, masquage d’autres satellites, etc.), voire devenir une arme par destination s’il est placé sur une trajectoire de collision avec un autre satellite. En outre, la « colonisation » de l’espace a laissé un grand nombre de débris[8] en orbite qui peuvent constituer des menaces sur les satellites opérationnels, dont ceux à vocation militaire. Cette pollution spatiale a ainsi un impact sécuritaire et doit être, autant que possible, maîtrisée. C’est la raison pour laquelle les activités spatiales militaires (et civiles) s’accompagnent aujourd’hui, dans les pays qui en ont la capacité, d’un segment terrestre de surveillance de l’espace dont le rôle est de plus en plus crucial. Connu sous le nom SSA (Space Situational Awareness), il est mis en œuvre, en France, par l’armée de l’air (activité permanente de surveillance, de poursuite et d’identification) avec le soutien de l’ONERA (qui a conçu et développé le radar GRAVES[9]), ArianeGroup avec le réseau d’observation GEOTracker, la Marine nationale et la DGA (Bâtiment d’essai et de mesure Monge) ainsi que le CNES (modifications éventuelles de la trajectoire des satellites).

La France comme acteur majeur de l’espace militaire « stratégique »[10]

L’ambition française de devenir une puissance spatiale majeure est attribuée au général de Gaulle. Le programme « Pierres précieuses », initié en 1959 par le premier Président de la Ve République, aboutit le 26 novembre 1965 au lancement d’Astérix, le premier satellite français. La France devient le troisième pays, après l’URSS et les États-Unis, à réaliser une telle prouesse. Selon Charles de Gaulle, l’époque le justifiait, ainsi concluait-il « Nous sommes au siècle des fusées et des avions.[11]» La doctrine militaire classique justifie cette assertion : la maîtrise du point haut procure en effet un avantage à son détenteur. Or, à l’âge nucléaire, être en capacité de pouvoir mettre seul un satellite en orbite est primordial. Elle traduit le caractère stratégique de l’espace.

Premièrement, la technologie des lanceurs civils et des missiles étant très proche, mettre en orbite un satellite permet aussi de prouver sa capacité de disposer de vecteurs balistiques pouvant embarquer des charges et frapper un ennemi au cœur de son dispositif. En soit, le spatial est un élément constitutif de la dissuasion nucléaire, dont le but est d’assurer tout agresseur potentiel de lui occasionner un maximum de dégâts n’importe où sur la planète. À cet égard, l’exploit du Spoutnik, mis en orbite par les Soviétiques le 4 octobre 1957, est marquant. Il a été vécu comme un cinglant avertissement par les États-Unis et a déclenché une riposte technologique d’ampleur (programmes Mercury, Gemini et Apollo) visant, certes, à l’exploration spatiale et lunaire mais cherchant avant tout à démontrer la puissance américaine en matière de lanceurs et de véhicules orbitaux. De son côté, la France n’est pas restée en retrait et a développé une force de frappe nucléaire qui lui a également conféré au statut de première puissance spatiale européenne. Celle-ci a été ensuite crédibilisée par le succès de la famille de fusées européennes Ariane, dont elle est très largement à l’origine (deux tiers des investissements), et de celui de son centre de lancement[12].

En second lieu, le fait de pouvoir disposer de satellites d’observation permet à une puissance nucléaire de connaître les capacités nucléaires de ses voisins, en termes de nombre et d’emplacements des sites mais aussi d’éventuelles mises à feu. Cela assoit l’effort de dissuasion en renforçant sa capacité de réaction et de précision. En effet, dans le cas où une attaque massive soudaine serait lancée, la riposte immédiate serait permise grâce à une détection, elle-même provoquée par un système d’alerte précoce. Là aussi, la « paix nucléaire » est garantie par de tels outils qui permettent à chacun de savoir quelles sont les capacités de l’autre et d’éviter les attaques surprises ou leurs fausses anticipations. Dans ce qui est dénommé l’« espace stratégique », la France dispose de capacités performantes et autonomes. Les satellites d’observation militaires Helios (à partir de 1995) et duaux Pléiades (à partir de 2011) pour l’observation et la reconnaissance optique l’illustrent. Leur successeur (système CSO[13]) consacrera la capacité française dans l’optique. L’une de leur mission « stratégique » est de surveiller et de vérifier la non-violation des traités de désarmement et de non-prolifération. Également, dans le cadre de l’« espace stratégique », la France a développé le programme expérimental SPIRALE[14], visant à se doter, à terme, d’un système d’alerte précoce qui, en plus de renseigner sur l’activité balistique de ses voisins, permet d’identifier les agresseurs et de préparer l’interception voire la riposte appropriée.

La France comme acteur non global de l’espace militaire tactique

L’effondrement du bloc soviétique et l’émergence de nouvelles formes de conflictualité aidant, les fonctions de l’espace militaire vont excéder celles de l’espace stratégique. À l’occasion de l’engagement de ses forces dans le Golfe, la doctrine militaire des États-Unis a transformé l’usage de l’espace et lui a donné une place centrale dans l’action opérationnelle. Après l’« espace stratégique », relié à l’âge nucléaire, il s’est alors agi de doper les capacités satellitaires aux nouvelles technologies du numérique et des capteurs pour accroître les effets et la précision des armes conventionnelles et ainsi faire face aux engagements irréguliers du tournant du siècle. Cet « espace au service du combattant[15]» visa d’abord à leur permettre de bénéficier de communications tactiques sécurisées et accessibles en tous points du globe. Il chercha ensuite à améliorer le ciblage des objectifs et à faciliter leur traitement par des capacités de renseignement et de géolocalisation accrue, quels que soient le milieu et les cibles mobiles ou non. Il se donna aussi pour objectif de protéger les forces en détectant et en alertant précocement des tirs de missiles de théâtre comme les fameux SCUD. L’espace est alors conçu comme un « multiplicateur de force[16]» avec des satellites aux performances de plus en plus impressionnantes.

Loin de disposer de toute la panoplie spatiale américaine, la France possède néanmoins, sur le plan tactique, certaines de ses capacités et s’appuie sur des moyens développés de façon autonome ou en coopération européenne. Ainsi, en matière d’observation, elle dispose aujourd’hui de systèmes Helios évolués[17] et s’attend à disposer de la Composante spatiale optique (CSO) qui doit, avec trois satellites lancés entre 2018 et 2021 [18], leur succéder avec une résolution accrue. Elle dispose aussi d’images issues des satellites Pléiades à vocation civile voire de satellites européens par le biais de coopérations bilatérales ou via le Centre satellitaire de l’Union européenne[19]. Dans le domaine des transmissions, la France a développé des systèmes à partir des années 1980. Cela commença, dès 1984, par des charges utiles embarquées sur des satellites civils. Il s’agissait des charges embarquées Syracuse [20] installés sur des satellites civils Telecom. Après avoir renouvelé ces moyens, entre 1991 et 1996, par une seconde génération Syracuse 2, elle dispose, depuis 2005 et 2006, de deux satellites Syracuse 3 à part entière et exclusivement dédiés aux opérations militaires. Depuis 2015, ils sont renforcés par un satellite militaire franco-italien Sicral et par le système à usage dual[21]. La France est désormais capable d’être reliée à plusieurs théâtres d’opérations simultanément et la loi de programmation militaire 2019-2025 prévoit la mise en service des deux premiers satellites Syracuse 4. Reste la géolocalisation, qui demeure un point faible des armées françaises qui sont dépendantes du GPS américain tant que le système européen Galileo ne sera pas totalement opérationnel (vers 2020). Pour autant, elle n’abandonnera pas le système des États-Unis et utilisera plutôt la redondance des deux constellations alliées.

En conclusion, malgré ses importants efforts dans le domaine du spatial militaire, la France reste une puissance spatiale militaire moyenne concurrencée, en outre, par le développement rapide de capacités dans de nombreux régions. Ainsi, une vingtaine de pays ont investi l’espace en y envoyant des satellites à vocation militaire (notamment des satellites de reconnaissance comme la Chine en 1975, Israël en 1995, le Japon en 2003, puis successivement l’Inde, Taïwan, la Corée du Sud, l’Arabie saoudite). Avec le dispositif CERES[22] dont le lancement des trois satellites est prévu pour fin 2020[23], la France pourrait toutefois entrer dans un cercle très restreint des pays ayant la capacité de récolter du renseignement d’origine électromagnétique (ou ROEM). Le programme succédera aux démonstrateurs ELISA[24], lancés en 2011. Un tel outil permettra de localiser les systèmes anti-aériens de puissances adverses ainsi que les activités radio de ses unités de combat. En revanche, la France, qui a acquis, grâce au démonstrateur SPIRALE[25]), une expertise dans l’alerte ne dispose plus, à ce jour, de capacités en la matière. L’ensemble de ces moyens satellitaires français permet de disposer, en tous points du globe et sans délai, de capacités telles que le recueil de données d’environnement, la communication, la localisation/navigation et le commandement et le contrôle opérationnels des forces nationales sur tous ses théâtres d’engagement. On peut donc considérer que l’autonomie d’infor-mation, de décision et d’action de la France est ainsi largement du fait du spatial militaire. Néanmoins, ce pays demeure une puissance spatiale « non cinétique » ce qui signifie qu’elle ne dispose pas, du moins à ce stade, de capacités « agressives » comme c’est le cas aux États-Unis ou en Chine. Son influence peut se révéler cependant importante face aux défis actuels posés par le spatial militaire.

La France peut faire montre d’atouts face aux prochains défis que pose l’espace militaire

La prédominance des États-Unis dans le spatial militaire est écrasante. Ainsi, sur l’ensemble des satellites militaires actifs en 2017, environ 150 seraient américains, 40 seraient russes et une cinquantaine relèveraient de la Chine. L’Europe ferme le ban avec 35 satellites militaires, dont huit français, sept pour chacune des armées allemande, britannique et italienne, deux espagnols et quatre en coopérations européennes dont tous impliquent la France. Ces chiffres européens n’intègrent toutefois pas le système de géo -positionnement Galileo dont la vocation n’est pas exclusivement militaire mais qui sera largement utilisé par les armées européennes (30 satellites à terme).

Les montants budgétaires reflètent aussi cette disparité. Si le budget militaire spatial de la France représente la moitié de celui de l’Europe (492 millions d’euros en 2017[26] contre 1 milliard pour l’Europe), celui de la Russie s’élève à 1,5 milliard tandis que celui de la Chine avoisine les 2 milliards. Or, pour les États-Unis, on arrive à une quarantaine de milliards. Au total, en 2016, 75 % des dépenses spatiales militaires sont américaines,[27] et la dynamique est au creusement d’écart. Ainsi, entre Washington et Pékin, les deux premières puissances militaires spatiales, le premier prévoit des augmentations budgétaires à hauteur du budget (total) du second[28]. Les priorités ne sont effet pas les mêmes. Vu la dépendance que l’outil militaire américain a développé vis-à-vis du spatial (par exemple les missiles américains pour la plupart guidés par GPS), la vulnérabilité est forte, d’où la volonté d’un « espace contrôlé », conséquence logique d’un espace devenu, en 1999, un « intérêt national vital pour les États-Unis », selon le secrétaire à la Défense du président Bill Clinton, William Cohen, dans sa directive spatiale militaire[29].

Ainsi, les États-Unis dépensent environ un milliard par an[30] à développer les capacités offensives (avec des armes à énergie cinétique ou à énergie dirigée) ou défensives de leurs satellites. En parallèle, les objets envoyés en orbite sont de plus en plus miniaturisés et les

pays en mesure de se rendre dans l’espace se multiplient. Si conflit il devait y avoir, celui-ci poserait problème au vainqueur lui -même sur la question de sa sécurité face aux débris. D’ores et déjà, depuis Spoutnik en 1957, plus de 41 000 objets d’une taille supérieure à 10 centimètres ont été laissés en orbite[31] (taille qui permet de les repérer). Or un débris d’un centimètre est suffisant pour détruire un satellite[32]. De plus, selon le syndrome de Kessler, la croissance du nombre des débris augmente de façon exponentielle car plus ils sont nombreux, plus ils sont en mesure d’entrer en collision et de générer d’autres débris, le phénomène s’autoalimentant. La France, en tant que puissance spatiale européenne majeure, peut non seulement aider avec ses capacités techniques (système de surveillance de l’espace Graves) pour participer à la cartographie continue des débris spatiaux. Elle peut surtout utiliser son poids (à la fois non négligeable et non menaçant pour les grandes puissances spatiales) pour pousser ceux-là s’entendre sur une non-militarisation de l’espace orbital, celle-ci semblant contre-productive. En effet, le seul envoi d’un ou deux missiles balistiques pour explosion et fragmentation peut détruire de nombreuses capacités satellitaires. Un combat asymétrique, avec la possibilité de faire passer cela pour un accident (et ne pas s’exposer frontalement aux représailles qu’un acte intentionnel ferait courir) montre le peu d’utilité qu’un espace militarisé pourrait offrir. La France peut ainsi préserver son outil militaire satellitaire (et celui des autres puissances spatiales) à travers des actions techniques et diplomatiques. Une approche que le général de Gaulle n’aurait pas reniée, lui qui déclarait que « la diplomatie est la poursuite de la guerre par d’autres moyens[33]». Pour faire face à ces enjeux spatiaux, la France apporte une réponse volontariste. Tout d’abord, la loi de programmation militaire 2019-2025, votée en 2018, intègre clairement la problématique de l’arsenalisation de l’espace. Par ailleurs, sur demande du Président Emmanuel Macron, une stratégie spatiale de défense va être définie en 2019. Pour le Président, elle « aura vocation à être déclinée, sur tous les aspects pertinents, sur le plan européen[34]».

References[+]


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