Les vaccins : la remise en cause de nos super héros

Mis en ligne le 19 Sep 2017

La santé est à la fois un enjeu individuel et un défi collectif. Santé de la personne et santé du groupe interagissent, et la problématique du vaccin est à ce titre exemplaire. A l’heure où les fausses rumeurs et croyances « viralisent » sur internet, des pathologies virales que l’on croyait éradiquées réapparaissent, s’engouffrant dans la brèche ouverte par la suspicion croissante à l’égard de la vaccination. Cet article expose avec rigueur, pédagogie et nuance les termes de l’enjeu clef de santé publique que constituent les vaccins.

Les opinions exprimées dans cet article n'engagent pas le CNAM.

Les références originales de ce texte sont: Anne Senequier, “Les vaccins : la remise en cause de nos super héros”, Programme Humanitaire & Développement, Iris, juillet 2017.Ce texte, ainsi que d’autres publications, peuvent être visionnés sur le site de l’Iris

Se poser la question de la légitimité de la vaccination est un problème de riche. Nous sommes « riches » parce que nos enfants ne sont plus paralysés par la polio, parce qu’ils ne meurent plus de la coqueluche, de la diphtérie ou encore de la rougeole. Toutes ces maladies infantiles, nous les avons oubliées. La société les a oubliées. On ne sait plus ce que c’est d’avoir un enfant qui meurt de diarrhée, un autre de s’être éraflé sur un clou rouillé. Nous avons oublié ce que c’est d’avoir 5, 6, voire 7 enfants, pour en voir survivre 2 à leur cinquième année…. En Occident, nous avons oublié… parce que nos enfants sont vaccinés depuis plusieurs décennies. Ce n’est pas le cas de tout le monde. Aujourd’hui encore et chaque année, 1,7 million d’enfants meurent de maladies qui auraient pu être évitées s’ils avaient été vaccinés[1].

Des témoignages de « ces enfants malades d’avoir été vaccinés », nous en avons tous lu, vu et entendu. Des histoires qui arrachent à chaque parent une larme et probablement un début de doute. Qui n’est pas inquiet pour ses enfants ? Cependant, rien dans ces témoignages ne permettrait d’aller à la barre pour affirmer du lien entre le vaccin et la pathologie. Pas plus pour affirmer le contraire d’ailleurs. Il faut partir du postulat qu’en 2017 (et pour encore longtemps), nos connaissances médicales sont loin d’être exhaustives et que par conséquent, rien n’est gravé dans le marbre. Le questionnement et la remise en question sont nécessaires pour nous permettre d’avancer, pour nous rendre compte que non, une saignée pour rétablir l’équilibre des humeurs ne maintient pas en bonne santé ; ou plus récemment que non, le Mediator n’était pas le médicament miracle qu’il prétendait être. Attention cependant, la polémique qui plane au-dessus d’un adjuvant ne doit pas remettre en cause le principe même de la vaccination.

 

Qu’est-ce que la vaccination et comment marche-t-elle ?

La vaccination est l’éducation du système immunitaire, une première rencontre avec une version « diminuée » de l’agent infectieux pour que nos globules blancs sachent comment réagir lorsqu’ils rencontreront le virus/bactérie pour lequel nous avons été vaccinés.

Physiologiquement parlant, il existe deux types de vaccins[2] :

  • Les « vaccins vivants atténués » qui sont constitués de germes (virus/bactérie) vivants mais « diminués ». Il s’agit globalement d’une version qui ne sait pas se défendre face à notre système
  • Les « vaccins inactivés » (tétanos) qui ne contiennent pas d’agents infectieux vivants mais plutôt un morceau de sa paroi. Cela va permettre à notre système immunitaire de connaître l’agent infectieux sans l’avoir vraiment rencontré.

 

La vaccination: pilier de la santé publique, le principe de l’immunité de groupe et ses limites

L’objectif princeps de la vaccination est de protéger l’individu. Cela dit, la vaccination a aussi un effet positif sur la collectivité dans la mesure où elle diminue le nombre de porteurs potentiels et protège ainsi les personnes vulnérables qui ne peuvent pas être vaccinées (les enfants trop jeunes ou les personnes trop fragiles). Les personnes vaccinées forment alors un rempart évitant la propagation de la maladie au sein de la population. Cependant, plus le nombre de non vaccinés est important, moins ce rempart est efficace.

Dans le cas de la rougeole et considérant sa contagiosité (un malade peut contaminer jusqu’à 15 personnes), la couverture vaccinale dans la population doit être d’au moins 95% pour conférer une immunité de groupe aux personnes ne pouvant pas se faire vacciner ou ceux pour qui cela n’a pas fonctionné (5% des personnes vaccinés). Ce qui explique qu’en refusant la vaccination, on mette en danger sa santé personnelle mais aussi celle des autres. C’est ce qui s’est passé à la fin des années 2000 en Europe et notamment en France. Une couverture vaccinale à 75% a engendré 20 000 cas de rougeole, 5 000 hospitalisations, 1 023 complications pulmonaires, 27 neurologiques et 10 décès (dont 9 de moins de 30 ans), alors que l’année précédente, 40 cas seulement avaient été répertoriés.

D’autre part, il existe des pathologies qui ne sont pas contagieuses mais qui pour autant sont présentes de façon endémique dans notre environnement, comme le tétanos. Dans ce cas, l’immunité de groupe est caduque et par conséquent, elle ne vous protégera pas d’une possible infection au Clostridium tetani. La nécessité de se faire vacciner en est d’autant plus grande.

 

Pourquoi certains vaccins sont-ils “obligatoires” et d’autres seulement “recommandés” ?

La distinction entre les vaccins « obligatoires/recommandés » instille le doute et la confusion dans les esprits. « Recommandé » a été compris à tort comme « facultatif », alors qu’ils sont tout simplement indispensables.

Le vaccin de la diphtérie est obligatoire depuis 1938, le tétanos depuis 1940 et la poliomyélite depuis 1964 ; trois décisions dans le but de se débarrasser définitivement de maladies handicapantes, voire mortelles, considérées à l’époque comme des fléaux sanitaires. L’obligation permettait de rendre ces vaccins accessibles à tous et ainsi de ne pas laisser des considérations de classes sociales entraver l’accès à la santé pour tous.

« L’accès à la santé » qui, soit dit en passant, représente le défi de la santé mondiale du XXIème siècle.

Depuis quelques années déjà, le ministère de la Santé pense à élargir l’obligation de vaccination à d’autres vaccins. La nouvelle ministre, le Dr Buzyn, envisage de mener à 11 le nombre de vaccins obligatoires (DTP, coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus Influenzae, pneumocoque, méningocoque C). Aujourd’hui, les 3 vaccins obligatoires (DTP : Diphtérie, Tétanos, Polio) ne sont plus disponibles sur le marché français. Le DTP fait aujourd’hui parti d’un vaccin penta ou hexavalent, ce qui signifie qu’il est combiné à d’autres vaccins. Cela évite la multiplication des piqures faites aux enfants et améliore la stabilité du vaccin DTP, qui était instable sous sa forme trivalente. Cependant, cela amène également quelques incohérences dans la mesure où sous couvert d’obligation de la vaccination au DTP, on se voit « imposer » le vaccin contre l’Haemophilus influenzae, l’hépatite B et la coqueluche. Il faut noter que cette confusion sémantique (obligatoire/recommandé) amène surtout des problématiques d’ordre juridique, dans la mesure où toute manifestation post-vaccinale indésirable (MPI) est prise en charge et reconnue en cas de vaccination obligatoire, ce qui n’est pas le cas dans une vaccination recommandée. Il en résulte des batailles juridiques afin d’établir la responsabilité de ces MPI dans le cas d’une vaccination combinée « obligatoire/recommandée »…

En ce qui concerne cette liste des 11 vaccins sélectionnés pour devenir obligatoires, il faut noter qu’elle reprend à une exception près la liste des vaccinations « systématiques recommandées » par l’OMS[3] révisée en mars 2017.

Pourquoi contraindre ? Beaucoup de défiance existe envers la vaccination. Les campagnes de vaccinations au coût considérable, les ratés de la vaccination contre l’hépatite B largement hors cible, coûts et profits excessifs, des éradications qui trainent en longueur (la polio)… En somme, nous n’avons plus confiance.

L’estimation de l’élargissement de la liste des vaccins obligatoire en France est de 10 à 20 millions d’euros par an pour la sécurité sociale. Mais combien coûterait la prise en charge des patients ayant contracté la rougeole, la coqueluche, les oreillons, l’hépatite B, la bactérie Haemophilus Influenzae ou le méningocoque dans ce même intervalle de temps ? Sans aucun doute, bien plus que 20 millions d’euros par an. Le problème de la vaccination n’est pas une problématique liée à l’argent, il sera toujours plus économique de vacciner que de payer le prix d’une prise en charge. Un vaccin contre l’hépatite B pour un adulte est à 17,01€, alors que le prix d’un forfait « transplantation d’un foie » est de 86 896, 94€ à aux Hôpitaux de Paris (APHP).

 

Les problématiques, fausses rumeurs ou vrai débat

Les fausses rumeurs et croyances erronées sont de vraies entraves à la santé publique et individuelle. Lors de la dernière épidémie Ebola, les fausses croyances – entre autres – furent à l’origine de la flambée qui amena le nombre de cas jusqu’à 20 000, alors que les précédentes ne dépassèrent pas la centaine. En 2003 au Nigeria, une rumeur circulait sur le fait que le vaccin contre la polio causait le VIH et rendait les filles infertiles[4]… La campagne de vaccination n’a donc pas pu atteindre son objectif devant les réticences de la population et des autorités. Au cours des années qui ont suivi, les cas de polio ont explosé au Nigeria alors que l’Afrique était sur le point d’être déclarée « exempte de polio » par l’OMS.

Aujourd’hui, plus de 40% des Français déclarent avoir une opinion défavorable de la vaccination. On l’a vu plus haut, certaines décisions en termes de politique de santé n’ont pas aidé. Sur cette base, catalysée par certaines interrogations – notamment à propos des adjuvants – notre couverture vaccinale se porte mal.

L’adjuvant est un facilitateur de la réponse immunitaire à la vaccination. Il présente l’agent pathogène au système immunitaire, il en est le support. Chaque vaccin a un adjuvant spécifique. La question se pose aujourd’hui pour l’Aluminium (adjuvant de certains vaccins) et son implication dans l’apparition de MFM : la « myofasciite à macrophage », une lésion histologique retrouvée au point d’injection du vaccin dans le deltoïde et qui provoquerait d’autres pathologies.

Lors de la recherche de « macrophagic myofasciitis » (MFM) sur PubMed (le moteur de recherche d’articles scientifiques), on retrouve 98 occurrences, dont 34 articles de la même équipe française à l’origine du débat sur les adjuvants aluminiques qui cite en référence ses propres travaux. Parmi les 64 autres recherches publiées, de très nombreux papiers citent en référence les travaux de cette même équipe française. Que l’injection d’un vaccin contenant un adjuvant aluminique provoque un granulome est un fait non contesté par la communauté scientifique et par les autorités sanitaires. Cela a d’ailleurs été confirmé par le Comité consultatif pour la sécurité des vaccins (CCSV) de l’OMS, mais rien dans ces données n’a permis de conclure à l’existence d’une association entre la lésion histologique et une pathologie spécifique. Devant le doute, une étude « cas-témoin » de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) et de l’Institut de veille sanitaire (InVs) a été menée quelques années plus tard pour arriver à la même conclusion. En 2015, un rapport de l’HAS[5] reconnaît encore une fois le lien entre vaccinations et la présence dans les muscles de granulomes contenant de l’aluminium (la lésion histologique), tout en mettant à jour plusieurs manquements dans la méthodologie des études qui affirme le lien de causalité entre les signes cliniques rapportés par les patients et la présence de MFM ; ce qui invalide de facto la conclusion de ces mêmes études. D’autant plus que la particularité de la myofasciite a macrophage est semble-t-il d’être une maladie franco-française, puisque l’hexagone regroupe la quasi-totalité des cas répertoriés.

Le débat s’enflamme lorsque l’on évoque la toxicité cérébrale de l’aluminium (Al). La toxicité neurologique de l’aluminium est un fait connu (depuis longtemps), ce qui a poussé l’OMS et la FDA (Food and Drug Association) à établir des valeurs toxicologiques de référence fixée à 1mg/kg/jour. Un vaccin contient 0,85mg d’Al par dose. De plus, la toxicité neurologique de l’aluminium est responsable de manifestations cliniques distinctes de celles décrites comme associées à la MFM. Cette même polémique vis-à-vis de l’aluminium se retrouve aujourd’hui au sujet du débat de l’implication des anti transpirants (contenant des sels d’aluminium) dans l’apparition du cancer du sein.

Au final, le débat entre sur les maladies causées par la vaccination n’a pas tant lieu dans le monde médical mais surtout sur Internet où les foules se déchainent : 19 500 résultats sur Google pour la MFM, contre 98 sur PubMed. Ces résultats sont grossis par des articles racoleurs du style « Du round-up dans les vaccins », des sites web mentant sur les recommandations de l’OMS – qui pourtant à ce jour recommande de ne pas modifier[6] les pratiques vaccinatoires dans le cas de vaccins contenant de l’aluminium -, ou encore certaines personnes qui, pour rester en bonne santé, proposent de fermer les frontières à l’immigration plutôt que de rendre les vaccins obligatoires… Rappelons à ce propos ce qu’il est advenu des civilisations andines lorsqu’elles ont rencontré pour la première fois les conquistadors et la variole… Il y a fort à parier qu’un partage préalable d’agent pathogène à petite dose aurait changé le cours de l’histoire.

La MFM n’est pas le seul fardeau que porte la vaccination aujourd’hui : on parle de la sclérose en plaque (SEP), de l’autisme, de l’infertilité… Qu’en est-il vraiment ?

L’Autisme et le vaccin ROR (Rougeole-Oreillons-Rubéoles) ? Le médecin auteur de « cette découverte de relation cause à effet » a été reconnu coupable de falsification de données. Son article publié par The Lancet (la revue médicale de référence au niveau mondial) a été retiré après la sortie de plusieurs études indépendantes prouvant des résultats contraires. Le taux de vaccination du ROR a malgré tout chuté, ce qui a entrainé une flambée des cas de rougeole/oreillons/rubéoles dans les années 2000 (cf. l’épidémie de rougeole en Europe à la fin des années 2000).

Pour ce qui est de l’autisme, deux petites choses à préciser. D’une part, son incidence n’a pas chuté suite à la diminution de vaccination via le ROR. D’autre part en 2017, on n’explique toujours pas les causes véritables de l’autisme.

Le lien entre la sclérose en plaque et l’Hépatite B, lui, a été établi par une étude sur une « population à risque » avec très peu d’inclus. Des études sur population générale ont retrouvé 5 cas déclarés de SEP parmi les 270 000 vaccinés entre 1992 et 1998 et neuf parmi les 290 000 non vaccinés. Il est vrai que certaines études trouvent une augmentation du nombre de diagnostics de SEP dans les années 1990. Cependant, l’arrivée de l’IRM dans l’arsenal thérapeutique au milieu des années 1990, ainsi que l’avènement de l’interféron, biaise un quelconque argument de temporalité.

Pour autant, les manifestations post-vaccinales indésirables pouvant altérer la santé d’un individu en bonne forme au préalable ne doivent pas être prises à la légère. Au niveau international, l’OMS a mis en place un comité consultatif mondial pour la sécurité vaccinale, entité que l’on retrouve également au niveau national. Les histoires de problématique de vaccin ne se limitent pas aux adjuvants, à la SEP, à l’autisme ou à l’empoisonnement au mercure. Pour dire vrai, dans l’histoire de la vaccination, les plus grands drames ont eu lieu suite à une mauvaise fabrication des vaccins, comme par exemple des vaccins contre la polio qui ont engendré des centaines de cas de paralysie aux États-Unis au XXème siècle. Néanmoins, malgré les doutes partagés par certains, les erreurs commises par d’autres et même s’il est vrai qu’un seul cas de dommage grave dû à un vaccin est toujours un cas de trop, le rapport-bénéfice/risque est toujours en faveur de la vaccination.

 

Pourquoi ne refait-on pas ces études de lien cause à effet ?

L’équipe soutenant la cause du lien causal Al-MFM évoquait dans une interview avec France Culture que le nombre de manifestations post-vaccinales indésirables (MPI) représentait 0,5% des vaccinés ; et elle s’insurgeait sur l’absence de financement pour ses recherches. Certes, 0,5% de MPI ce n’est pas rien. Cependant, l’ennui c’est que justement, ce n’est pas le seul problème. Et on l’a compris, les fonds alloués à la recherche et à la santé en général sont limités. La santé publique au niveau international, c’est établir des priorités. Il faut donc gérer avec un budget limité des problématiques multiples et variées telles que (entre autres bien sûr) :

  • Le tabac qui tue 6 millions de personnes par an,
  • Les maladies non transmissibles (diabète, maladie cardio-vasculaire, cancer, maladie respiratoire chronique) qui représentent 63% des décès au niveau mondial,
  • La lutte contre les maladies parasitaires (la moitié de l’humanité est exposée au paludisme, 212 millions de cas chaque année et près de 430 000 décès),
  • La lutte contre la mortalité néonatale et infantile
  • Inventer une prise en charge adaptée et globale de nos personnes âgées de plus en plus nombreuses,
  • L’épidémie du VIH (36,7 millions de personnes vivent actuellement avec le VIH, seulement 18,2 millions sont sous traitement antirétroviral),
  • Plus d’un milliard et demi d’adultes en surpoids,
  • La dépression avec 300 millions de personnes touchées,
  • Le suicide avec 1 mort toutes les 40 secondes au niveau mondial (le suicide fait plus de morts que les guerres et les homicides réunis),
  • Les accidents de la route qui coûtent à la plupart des pays 3% de leur PIB,
  • L’IVG avec 22 millions d’avortements non médicalisés par an dans le monde. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir une Mme Veil dans son pays…
  • Les résistances antibiotiques qui nous obligent à penser une ère post-ATB (antibiotique) et nous met dans l’urgence de trouver une alternative aux ATB (d’où l’intérêt de la vaccination, soit dit en passant)
  • La grippe qui réapparaît régulièrement…

 

Dans le meilleur des mondes, nous arrêterions de fabriquer et d’acheter des armes et nous aurions peut-être l’argent nécessaire pour mener toutes ces études et ces recherches. Mais finalement même dans ces cas, les financements seraient attribués aux études répondant à certains critères méthodologiques, évitant les biais de sélections et d’interprétation, se basant sur des faits vérifiés, vérifiables et reproductibles, ce qui a manqué jusqu’à ce jour aux études affirmant un lien entre MFM et une pathologie spécifique. Il serait cependant judicieux de financer quand même ces études, tout simplement parce que Paris vaut bien une messe…

 

C’est comment ailleurs ?

Ailleurs, les systèmes diffèrent. Certains n’ont aucune obligation, d’autres oui en fonction de leurs histoires sanitaires et politiques récentes. Cependant, tous essaient simplement de diminuer la mortalité infantile. C’est d’ailleurs l’objectif n°3 « bonne santé et bien-être » du développement durable mené par Organisation des Nations unies (ONU), avec notamment pour cible d’éliminer les décès évitables de nouveau-nés et d’enfants de moins de 5 ans d’ici à 2030. Pour ce faire, l’ONU entend chercher à ramener la mortalité néonatale à 12 pour 1 000 naissances vivantes au plus et la mortalité des enfants de moins de 5 ans à 25 pour 1 000 naissances vivantes au plus. Deux régions du monde n’ont pas encore atteint cet objectif : l’Asie avec 34‰ se rapproche de l’objectif, d’autant plus qu’elle affichait un taux de mortalité infantile à 87‰ en 1990 ; la zone Afrique part de plus loin avec un taux de mortalité de 164‰ dans les années 1990, ramené à 76 ‰ en 2015.

Afin d’accompagner chaque acteur de santé (professionnel et gouvernement) dans cet objectif commun, l’OMS et l’UNICEF à travers la PCIME (Prise en charge intégrée des maladies de l’enfant) proposent des méthodes simples et efficaces pour prévenir et soigner les principales causes de maladies graves et de mortalité chez les jeunes enfants. Trois piliers soutiennent cette initiative : l’hygiène, la bonne utilisation des médicaments et… la vaccination qui, seule, permettrait de donner une chance à 1,7 million d’enfants chaque année.

Pour qu’une campagne de vaccination fonctionne, il est nécessaire d’avoir un système de santé fonctionnel ; on retombe alors dans une problématique de priorité budgétaire. Dans de nombreux États, la santé est encore aujourd’hui considérée comme un coût que l’on ne peut se permettre : pas de budget, pas de médicaments, pas de chaîne du froid, pas de professionnel formés correctement, pas de sensibilisation de la population à la santé, ce qui induit une couverture vaccinale insuffisante. Au vu de la mondialisation et du mouvement de flux des populations d’aujourd’hui, on ne peut plus considérer la santé comme un concept personnel ; il est temps d’embrasser également sa notion plus globale : la santé publique, ou la santé du groupe, pour protéger la santé individuelle. Pour ne prendre qu’un exemple, la rougeole ayant été éradiquée de la zone Amérique, est-ce que pour autant, les gens devraient arrêter de se faire vacciner ? Combien de touristes, étudiants et professionnels des Amériques viennent en Europe chaque année où la rougeole est encore présente ? Combien d’étrangers foulent le continent américain chaque année ? Autant dire que maintenir cette éradication est utopique si de notre côté de l’océan nous ne faisons pas d’effort.

Qu’en est-il de demain ?

La réapparition d’épidémies de maladies connues et reconnues (la rougeole en Europe, la poliomyélite en Syrie en mai 2017), l’expansion géographique de certains virus et l’apparition de nouveaux (la grippe A), redonnent une place prépondérante au principe de vaccination dans la lutte contre les maladies infectieuses.

À côté de ce rôle traditionnel, et de façon indirecte, la vaccination joue également un rôle important dans la prévention de nombreuses problématiques de santé publique, comme la résistance aux (ATB) antibiotiques, l’infertilité, les cancers, etc. Via la vaccination des pathologies respiratoires (pneumocoque..), on évite de facto une mauvaise utilisation des ATB augmentant la problématique de résistance des bactéries aux ATB. Le vaccin contre le papillomavirus humain HPV permet d’éviter les lésions cancéreuses des voies génitales et certains troubles de la fertilité qui peuvent en découler. Idem pour la cirrhose et cancer du foie découlant de l’hépatite B.

Le vaccin de demain, lui, se veut thérapeutique et pourrait à terme apprendre au système immunitaire déjà atteint de se débarrasser de certains cancers (mélanomes) ou du SIDA.

« Obligation de vacciner » : est-ce que cela suffira ?

Que faire pour diminuer la défiance des Français envers la vaccination ? L’obligation est une mesure destinée à répondre à une situation d’urgence. Oui, nous sommes dans une situation d’urgence, ne serait-ce parce qu’en termes de couverture vaccinale de la rougeole, le taux actuel est identique[7] au taux de 2008 au début de l’épidémie qui fit 20 000 cas. Cette obligation est une solution sur le court terme et elle a le désavantage d’augmenter la suspicion des populations, autant envers les autorités sanitaires que l’industrie du vaccin en général.

Encadrer les prix des vaccins dits « essentiels/indispensables » c’est bien et parfois indispensable. Cependant, il faut aussi comprendre que même si le chiffre d’affaires estimé de l’industrie du vaccin en 2016 est de 42,3 milliards d’euros, cela ne suffit pas pour affirmer que « ces vaccinations obligatoires sont un cadeau pour les industries pharmaceutiques ». Le marché mondial du médicament est lui estimé à 800 milliards d’euros. Au final, le chiffre d’affaires des vaccins ne représente que 5,2% du chiffre d’affaires total de l’industrie du médicament. Pas de quoi en faire un fer de lance d’une industrie, contrairement aux antidiabétiques et anti-cholestérolémiants (qui se classent parmi les dix produits les plus vendus dans le monde). Peut-être que ce « cadeau », nous le faisons nous-mêmes aux industries pharmaceutiques…

Dans notre contexte de suspicion et d’un point de vue strictement épidémiologique, l’élargissement de l’obligation de la vaccination est cohérent dans la mesure où il va éviter la réapparition d’épidémie due à une couverture vaccinale actuellement trop faible. Le message principal de cette mesure, c’est donc protéger la population (parfois malgré elle). Cette disposition est compréhensible et acceptable, à la seule condition de ne pas s’arrêter là. L’obligation se doit d’être la première pierre d’un édifice à plus grande échelle et sur plus long terme qui vise à regagner la confiance de la population et des acteurs de santé (non épargné par le doute) avec une approche multisectorielle et globale, qui implique le gouvernement, les médias, les acteurs de la santé et la société civile. La santé n’est ni un dû, ni un coût, c’est un objectif commun pour lequel individu et collectivité doivent travailler main dans la main.

Pour que dans quelques années, on puisse lever l’obligation sans que le taux de vaccination en pâtisse, il serait juste de tabler sur une meilleure sensibilisation à la santé pour que les communications ultérieures soient bien accueillies et surtout comprises.

En premier lieu et dès aujourd’hui, il est urgent de donner une réponse aux inquiétudes de la population à propos des vaccins, des adjuvants, des MPI, des succès, des interrogations qui persistent et des échecs de la vaccination, afin de ne pas laisser le doute s’installer. Il faut aller plus loin que l’édition de trois posters et d’une carte postale sur le calendrier vaccinal[8]. Il s’agit de rétablir la confiance mutuelle et ne pas laisser Google répondre à des questions adressées en premier lieu aux autorités sanitaires et qui bien souvent restent sans réponses. On pourrait, par exemple, instaurer un siège pour les représentants de la société civile dans les différents comités sanitaires, afin que les routes de la communication soient doubles et transparentes.

Une communication sur le fonctionnement des autorités sanitaires au niveau national serait également intéressante. Comment sont prises les décisions ? Sur quels critères ?

Qui finance les autorités sanitaires ? Comment sont financés la recherche et le développement ? Qu’est-ce que l’épidémiologie ?

Il faudrait aussi renforcer les connaissances des médecins qui sont en première ligne. Cela implique de communiquer de façon régulière avec un message simple et clair sur les études et les résultats d’investigation à propos des manifestations post-vaccinales indésirables – notamment l’adjuvant de l’aluminium -, l’autisme et le vaccin ROR, la SEP et l’hépatite B et toutes les autres problématiques. Une grande majorité d’entre eux ne sont pas capables aujourd’hui de répondre aux questions des patients en ce qui concerne la vaccination.

Enfin, il est également important de rétablir une éducation sanitaire à la population tout au long de la scolarité, par le biais d’une communication moderne et adaptée à l’âge, utilisant les médias sociaux et les médias traditionnels. Une « Aventure de médecine » sur les vaccins ne serait pas inappropriée, voire même une série médicale réaliste «made in France»… Il est temps de penser des communications innovantes.

De nombreuses idées sont donc à mettre en place. L’esprit critique national est une bonne chose et permet à tous d’avancer, il est temps de s’en servir pour entrevoir une nouvelle dynamique à notre objectif commun : vivre vieux et en bonne santé. Le chemin est encore long. Nous sommes toujours dans l’attente d’un vaccin contre le paludisme, la tuberculose et le SIDA (entre autres), qui permettraient d’éviter près de 4 millions de décès chaque année.

References[+]


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