Nouvelle vague technologique et emploi ; une analyse critique des travaux sur les destructions d’emplois

Mis en ligne le 13 Mar 2018

Cet article s’attache à (re)poser de façon cohérente le débat innovations technologiques/emplois, pour en éviter les biais anxiogènes. L’étude menée par le Conseil d'Orientation pour l'Emploi (COE) sur laquelle l’auteure appuie son raisonnement adopte en effet un angle nouveau, s’intéressant non aux métiers mais à l’activité réellement effectuée par les salariés. Cette approche globale permet de battre en brèche les conclusions alarmistes. Elle permet également de mieux préparer la société à accompagner les transformations pour en tirer tout le potentiel positif.


Les opinions exprimées dans cet article n’engagent pas le CSFRS.

Les références originales de ce texte sont :

Marie-Claire Carrère-Gée, « Nouvelle vague technologique et emploi : une analyse critique des travaux sur les destructions d’emploi », Futuribles, (N° 421).

Ce texte ainsi que d’autres publications peuvent être visionnés sur le site de Futuribles : www.futuribles.com


 

 

Nouvelle vague technologique et emploi

Une analyse critique des travaux sur les destructions d’emplois

 

Les progrès fulgurants réalisés dans le champ de la robotique et de l’intelligence artificielle, l’essor de l’Internet des objets, le traitement des données de masse ou l’émergence de l’impression en trois dimensions (3D) alimentent aujourd’hui des inquiétudes autour d’un futur sans emploi. Un bref regard rétrospectif pourrait conduire à balayer de telles craintes : si chaque révolution technologique a fait redouter l’apparition et la persistance d’un chômage technologique, les innovations des deux derniers siècles ne se sont pas accompagnées d’une réduction de l’emploi, ni a fortiori de sa disparition. Dans le sillage des révolutions technologiques précédentes, l’emploi s’est transformé, mais il a augmenté.

 

Une vague technologique massivement destructrice d’emplois ?

Si le débat resurgit aujourd’hui, ce n’est pas seulement par méconnaissance de l’histoire économique. C’est aussi en raison de l’ampleur et de la nature même de la vague technologique actuelle : elles lui confèreraient un potentiel de destruction d’emplois sans commune mesure avec les créations d’emplois nouveaux qu’elle induirait.

L’ampleur de cette vague apparaît en effet inédite. La capacité croissante de perception et d’adaptation des robots à des environnements complexes, leur dextérité ou encore leur faculté de communiquer ou d’interagir avec d’autres robots, ou directement avec les humains, changent la donne. Le spectre des tâches et des fonctions de l’entreprise pouvant être automatisées, ainsi que celui des secteurs concernés s’élargit, en s’étendant au-delà de l’industrie pour toucher aussi les services. Au-delà, la vague technologique actuelle modifie en profondeur les modes de consommation et d’échange de biens et services, jusqu’à les bouleverser : en particulier, les processus de circulation instantanée d’information permis notamment par le développement de plates-formes numériques, qui restaient au cours des décennies précédentes largement internes aux entreprises s’étendent également entre entreprises et jusqu’au client final. On pense par exemple au géant du commerce en ligne Amazon, ou à des plates-formes comme Airbnb, Uber, Deli veroo, qui ont modifié profondément les modes de consommation, déstabilisant les secteurs où ils se sont implantés. Au-delà du seul système productif, la diffusion de ces innovations induit des transformations profondes dans l’organisation sociale, en alimentant par exemple une diversification des formes d’emploi.

La nature de la vague technologique actuelle est également spécifique. D’une part, les innovations à l’œuvre sont interdépendantes. Les technologies informatiques et numériques peuvent être intégrées à de nombreuses autres technologies, avec pour effet d’en améliorer les performances. Les progrès qui pourront être faits dans les domaines de l’intelligence artificielle ou de la robotique découlent fortement des avancées réalisées dans les technologies de big data ou de l’essor de l’Internet des objets. Or, ces dernières avancées sont elles-mêmes conditionnées, dans une large mesure, par les progrès réalisés dans des domaines tels que l’accroissement de la vitesse des ordinateurs, la modélisation et la simulation numérique, l’« infonuagique » (cloud computing) ou encore le très haut débit, voire le développement des nanotechnologies. Certaines nouvelles technologies peuvent en retour favoriser de nouveaux modes d’innovation ou de diffusion des innovations. C’est le cas de plates-formes numériques permettant à différents acteurs d’un domaine d’échanger sur leurs avancées respectives dans tel ou tel domaine d’innovation. C’est le cas également de technologies d’open data qui permettent de partager à une très large échelle, et gratuitement, des données ou des programmes informatiques.

D’autre part, les machines deviennent apprenantes : elles acquièrent une autonomie qui émerveille autant qu’elle effraie. Des machines intelligentes communiquent désormais entre elles. Les importants progrès dans plusieurs branches de l’intelligence artificielle élargissent le champ des activités susceptibles d’être automatisées — c’est-à-dire celles qui peuvent être décrites en un ensemble de règles bien définies — à des activités complexes et ayant une forte dimension cognitive. La compréhension de problèmes complexes et leur traduction sous la forme de règles explicites, de raisonnements probabilistes ou d’apprentissage profond pouvant constituer autant de substituts à la décision humaine, sont notamment favorisées par les technologies de big data, qui permettent la collecte et le traitement d’importants volumes de données pertinentes. Les données rendent possible par ailleurs la quantification de façon objective des succès des programmes, ce qui permet de continuellement les améliorer. En témoigne par exemple la capacité de dialoguer en langage naturel avec des smartphones pour leur poser des questions variées, et surtout obtenir des réponses pertinentes ; ou encore des applications visant à améliorer sensiblement la maintenance en la rendant prédictive.

Par son champ et son intensité, la révolution technologique en cours pourrait donc avoir un impact inédit sur l’emploi, et cela même si les économistes ne trouvent aucune explication pleinement satisfaisante à la stagnation actuelle de la productivité[1]

À l’appui de cette thèse, plusieurs études sont venues chiffrer les destructions d’emplois significatives, voire massives que pourrait entraîner cette foudre du progrès technologique s’abattant sur nos emplois, sans cependant s’accorder sur leur ampleur, qui serait comprise entre 9 % des emplois actuels aux États-Unis (Melanie Arntz et alii)[2] et 47 % (Carl Frey et Michael Osborne)[3]. La différence notable dans l’ampleur des destructions d’emplois[4] estimée dans ces deux études qui ont fait date, tient à une différence dans les approches retenues (voir encadré ci-contre) : Melanie Arntz et alii en tendent approfondir et affiner l’approche de Carl Frey et Michael Osborne en passant d’une approche par métiers à une approche par tâches. Cette dernière est plus à même de cerner l’ampleur des destructions d’emplois.

 

Un débat mal posé

Le débat, pour être instruit, nous paraît cependant mal posé. Première ment, ces études ne considèrent que les destructions d’emplois, occultant les créations d’emplois en lien avec le progrès technologique. Bien sûr, les créations d’emplois directement liées à la technologie, au numérique et à la robotique en l’occurrence, ne sont pas massives. Le numérique représente une part marginale de l’emploi salarié en France, environ 3,9 %. Mais sur la période 2009-2014, l’emploi créé dans ce secteur d’activité a crû de 2,6 %, alors qu’il n’a progressé que de 0,6 % pour l’ensemble de l’économie. Il y a ensuite différents mécanismes qui, d’un point de vue théorique, peuvent réduire, voire compenser intégralement et au-delà, les pertes d’emplois initiales liées à l’introduction de nouvelles technologies. Et cela via la réduction des prix de production, l’augmentation de la demande, les nouveaux investissements et l’augmentation de la demande de travail. Leur ampleur dépendra de quantité de facteurs comme le contexte institutionnel (normes sociales, juridiques ou techniques), le fonctionnement des marchés (nature et intensité de la concurrence, élasticité de la demande au prix), les coûts respectifs du capital et du travail et les possibilités de substitution entre ces deux facteurs de production, ou la formation des anticipations des agents économiques (entreprises et consommateurs). L’effet final sur l’emploi est donc difficilement prévisible. Enfin, les innovations à l’origine de produits ou de services nouveaux peuvent créer spontanément de l’emploi en suscitant l’apparition de nouvelles activités à condition qu’elles ne « cannibalisent » pas des activités existantes. Il est naturellement difficile de cerner et a fortiori de quantifier ces nouveaux emplois qui seront créés : on sait ce que l’on perd, pas ce que l’on gagne. Ce serait une grossière erreur, par exemple, que de considérer les besoins des consommateurs comme li mités dans leur volume à leur niveau actuel et non susceptibles d’évoluer pour porter vers de nouveaux produits et services apparus avec le progrès technologique.

Notre analyse est que le potentiel de création d’emplois indirects lié à la vague technologique actuelle est réel, et cela pour trois raisons. D’une part, l’impact des avancées réalisées dans les domaines de l’intelligence artificielle et de la robotique ne se résume pas à une rationalisation des processus de production : celles-ci font déjà émerger, dans d’autres secteurs que celui du numérique et de la robotique, de nouveaux produits et de nouveaux services, créateurs d’emplois. D’autre part, dans un pays comme la France, la diffusion des technologies d’automatisation pourrait permettre aux secteurs exposés à la concurrence internationale, et notamment à l’industrie, d’améliorer leur compétitivité, avec un effet positif sur l’emploi : plus compétitives, les entreprises industrielles françaises pourraient gagner des parts de marché à l’étranger, et donc augmenter leur production avec in fine des effets positifs sur l’emploi. Enfin, l’amélioration de la productivité et le re gain de compétitivité dans les secteurs exposés à la concurrence internationale liés à ces nouvelles technologies pourraient avoir des effets d’entraînement supplémentaires dans les secteurs abrités.

Il reste qu’il est plus que délicat de dépasser un cadre rétrospectif ou théo rique et de se livrer à des pronostics de créations d’emplois : par définition, on ne connaît pas, par exemple, les nouveaux produits susceptibles d’entraîner des créations d’emplois, pas plus que les futures décisions de politique publiques qui seront susceptibles d’accélérer ou freiner les créations d’emplois. Les études empiriques rétrospectives (et notamment celles sur la France ces 30 dernières années) tendent toutefois à montrer que les innovations technologiques ont eu globalement un effet positif sur l’emploi, cet effet pouvant varier selon le niveau d’analyse, la période ou le progrès technologique considéré.

Si le débat actuel est à nos yeux mal posé c’est, deuxièmement, parce qu’il est souvent considéré que toute technologie disponible qui permettrait de se substituer à un emploi est forcément mobilisée. Mais ce n’est pas ce qui se passe dans la vraie vie ! D’abord, il y a la question de la rentabilité économique d’une telle substitution. Ensuite, c’est faire fi de tous les freins sociaux et culturels qui peuvent se manifester : toutes les technologies ne sont pas acceptées socialement. Enfin, il y a des aspects institutionnels : la technologie, c’est ce que les sociétés décident d’en faire, ce sont les barrières éthiques ou réglementaires qu’elles décident, ou non, d’ériger pour définir un cadre acceptable à leur utilisation.

Troisièmement, le débat actuel fait souvent aussi l’impasse sur la question pourtant centrale de la localisation des emplois. Les avancées technologiques en cours ne constituent pas un phénomène isolé : elles interviennent en même temps que d’autres phénomènes, avec lesquels elles sont en inter action. On pense par exemple à la fragmentation croissante des processus de production, au renforcement de la financiarisation des économies, à la concurrence internationale ou encore à la mondialisation des échanges. En abaissant les coûts de la distance et de la coordination, les technologies de l’information et de la communication ont ainsi pu favoriser des délocalisations de certaines activités industrielles ou de service routinières vers des pays où le coût du travail est faible.

Cette tendance, en cours depuis les années 1980, pourrait néanmoins s’atténuer voire dans certains cas s’inverser, avec possiblement des relocalisations, grâce notamment aux possibi lités croissantes d’automatisation. En effet, la diffusion des nouvelles technologies numériques et robotiques combinée à des transformations de la demande, des hausses des coûts de production dans les pays émergents et des coûts des transports, pourrait être favorable à des retours d’activités préa lablement délocalisées vers les pays émergents. Les nouvelles attentes des consommateurs, avec une demande renforcée de personnalisation des biens et des services et de garantie sur la qualité des produits, rendues, partiellement au moins, possibles grâce au numérique, peuvent conduire les entreprises à privilégier une localisation à proximité des consommateurs finaux pour être en mesure d’adapter leur production rapidement. Les possibilités offertes par l’impression 3D pourraient peut-être aussi, à terme, favoriser la localisation en France de lieux de fabrication de produits ou pièces détachées. Enfin, l’extension des possibilités d’automatisation dans la production indus trielle mais aussi dans les services, peut conduire les entreprises à réévaluer la répartition entre capital et travail, et donc l’importance relative de leur coût. Peu d’études ont ainsi cherché à évaluer l’impact des relocalisations de l’emploi. Les principales études en la matière ont été réalisées par des cabinets de conseil sur les États-Unis et le Royaume-Uni, et considèrent que les relocalisations seront associées à des créations nettes d’emplois. Une étude de 2015 du cabinet Ernst & Young estime ainsi que les relocalisations pourraient créer jusqu’à 315 000 emplois au Royaume-Uni[5].

 

Enfin, il y a souvent dans les débats actuels une appréciation erronée des conditions de l’impact du progrès technologique sur l’emploi. Si des études comme celle de Carl Frey et Michael Osborne, conduite sur la base de données américaines, ou celle du cabinet Roland Berger qui en a transposé les conclusions au cas français[6], surestiment massivement les destructions d’emplois potentielles, c’est qu’elles considèrent, pour faire court, que le progrès technologique s’attaque à des métiers en tant que tels, et à l’emploi de l’ensemble des personnes qui effectuent le même métier.

 

Or, de notre point de vue, le progrès technologique affecte des tâches bien spécifiques au sein d’un métier, et pas nécessairement l’intégralité des tâches susceptibles d’être effectuées dans le cadre de ce métier. De plus, toutes les personnes qui exercent un même métier n’accomplissent pas strictement les mêmes tâches. Au total, raisonner par métiers conduit à négliger, non seulement toute la diversité des activités effectuées dans le cadre d’un emploi, mais aussi tout le potentiel de transformation des mé tiers. Et c’est bien souvent à des transformations que l’on assiste en réalité : si des métiers apparaissent et d’autres disparaissent, les évolutions les plus fréquentes se déroulent à l’intérieur d’un même métier ou d’un même em ploi. Les conseillers bancaires n’ont pas disparu avec la diffusion des guichets automatiques : ils ont vu leur activité se réorienter vers d’autres services aux clients, et ils ne distribuent plus de billets. Un ingénieur d’affaires, un chargé de recrutement, un chargé de communication n’ont pas la même activité, aujourd’hui, qu’il y a 15 ans : la vague de numérisation a contribué à des évolutions considérables du contenu de ces métiers. L’emploi dans ces secteurs n’a pas disparu : il s’est puissamment transformé, dans son contenu.

 

L’étude du Conseil d’orientation pour l’emploi

Pour cette raison, le COE a voulu conduire sa propre enquête en se basant, non sur une approche par métiers, mais sur la réalité de ce que font les salariés dans leur emploi actuel[7].

Les conclusions de l’étude sont très claires : elles confirment que l’enjeu de la révolution technologique, du point de vue de l’emploi, est moins celui d’un futur sans emploi que celui d’une transformation massive du contenu des emplois existants. En effet, si moins de 10 % des emplois pré sentent un cumul de vulnérabilités tel qu’il est susceptible de menacer leur existence dans un contexte d’automatisation et de numérisation, l’étude montre que la moitié des emplois existants est susceptible d’évoluer, dans leur contenu, de façon significative à très importante.

L’étude montre aussi qu’en tout cas dans le cadre de la frontière technologique actuelle, le progrès technologique continuerait à favoriser plutôt l’emploi qualifié et très qualifié : parmi les emplois vulnérables, les métiers surreprésentés, en volume ou au regard de leur part dans l’emploi total, sont souvent des métiers pas ou peu qualifiés.

Regardons, en effet, quels sont les métiers les plus représentés, d’une part dans les emplois vulnérables et, d’autre part, dans les emplois susceptibles d’être profondément transformés dans leur contenu.

Parmi les emplois les plus exposés (graphique 1), les métiers proportionnellement les plus représentés par rapport à leur part dans l’emploi salarié total sont le plus souvent des métiers manuels et peu qualifiés, notamment de l’industrie : ouvriers non qualifiés des industries de process, ouvriers non qualifiés de la manutention, ouvriers non qualifiés du second œuvre du bâtiment, agents d’entretien, ouvriers non qualifiés de la mécanique, caissiers. On peut trouver aussi quelques métiers qualifiés : ouvriers qualifiés de la mécanique et ouvriers qualifiés des industries de process par exemple.

 

Parmi les emplois les plus susceptibles d’évoluer du fait de l’automatisation (graphique 2), les métiers proportionnellement les plus représentés par rapport à leur part dans l’emploi salarié total sont également souvent des métiers manuels et peu qualifiés, mais ils relèvent plus du secteur des services que les métiers les plus exposés : conducteurs, caissiers, agents d’exploitation des transports, employés et agents de maîtrise de l’hôtellerie et de la restauration, aides à domicile et aides ménagères par exemple.

On assisterait donc à la poursuite de deux évolutions constatées au cours de la décennie passée : une évolution de la structure de l’emploi profitant aux plus qualifiés, d’une part, et une poursuite de la complexification du contenu des métiers, d’autre part.

La diffusion des technologies numériques au cours des 10 ou 15 dernières années est en effet l’une des causes de la déformation de la structure de l’emploi constatée dans les pays développés et en France. Ces technologies seraient en effet plus facilement substituables aux emplois auxquels sont associées des tâches manuelles et cognitives routinières. Il s’agit plutôt d’emplois de niveau de qualification intermédiaire. Elles seraient en re vanche complémentaires aux emplois auxquels sont attachés des tâches non routinières qui impliquent de résoudre des problèmes, de faire preuve créativité ou de leadership. Il s’agit plutôt d’emplois de niveau de qualification élevé.

Plusieurs travaux rendent compte, aussi, d’une relative complexification des métiers existants en lien avec la diffusion de technologies nouvelles, marquée par un essor des compétences analytiques et relationnelles. On assiste par exemple (en particulier pour les cadres) à une mobilisation généralisée des compétences transverses : gestion de projet, capacité à travailler au sein d’équipe pluridisciplinaire, capacité à développer un réseau ou à communiquer (avec des collègues ou des clients), bonne compréhension de la stratégie d’entreprise, prise en compte des enjeux commerciaux.

La modification des compétences exigées sur le marché a aussi été tirée par l’émergence de nouveaux métiers dans le domaine du numérique et aux quels sont attachées des tâches nouvelles et plus complexes. Ainsi, parmi quelque 150 nouveaux métiers recensés depuis 2010, une centaine appartiennent au domaine du numérique.

Du point de vue de la localisation des emplois, les territoires les plus susceptibles de connaître des destructions d’emplois à cause des possibilités croissantes d’automatisation seraient ceux où les secteurs industriels traditionnels faiblement intensifs en technologie représentent une grande part de l’emploi, et cela d’autant plus lorsque ces territoires sont spécialisés dans ces secteurs, qu’ils se caractérisent par une forte densité en travailleurs peu qualifiés ou un grand nombre de personnes ayant des métiers routiniers.

D’autre part, les territoires qui pourraient bénéficier de la diffusion des technologies seraient, d’abord, les territoires capables d’attirer des relocalisations notamment industrielles, ensuite, les aires urbaines où les entreprises peuvent profiter d’économies d’agglomérations et puiser dans un vivier de talents dont les compétences sont complémentaires des nouvelles technologies.

Le développement de secteurs soutenus par ces avancées technologiques peut enfin avoir des effets plus indirects sur l’emploi au niveau local, en favorisant le développement d’emplois induits. L’emploi dans les industries intensives en technologie ou plus généralement dans le secteur marchand peut ainsi conduire à des créations d’emplois dans les services qualifiés et peu qualifiés au sein de la même économie locale.

Dans un contexte de grande incertitude liée tant à la vitesse de diffusion des progrès technologiques qu’à de possibles sauts, par définition difficiles à anticiper, c’est bien la capacité collective à gérer cette période de transition qui fera la différence : en cherchant, non à se protéger contre la foudre du progrès technologique, mais à bien conduire cette grande transformation ; en cherchant à maximiser le potentiel de créations d’emplois directs et surtout indirects liés aux technologiques, et à faciliter la localisation ou la relocalisation d’emplois ; en adaptant, aussi, la protection sociale à cette nouvelle donne, marquée par des transitions entre emplois fréquentes, l’acquisition par les actifs en postes de nouvelles compétences et une montée prévisible des inégalités — le progrès technologique favorisant, à un horizon proche tout au moins, toujours plus les mieux qualifiés et les territoires déjà les plus richement dotés.

References[+]


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