La question des diasporas et de leur influence géopolitique est reformulée par les transformations contemporaines majeures en matière de mobilité et de communications. Ce constat s’applique au cas du Venezuela. Le présent papier aborde la question relativement récente de l’émigration issue de ce pays, avant de s’interroger sur son évolution, sur les causes associées, et sur ses effets géopolitiques. Ces effets géopolitiques concernent le pays de départ, mais également les différents pays d’accueil, tout en traçant différentes perspectives que l’analyse s’attache à mettre en lumière.
Les opinions exprimées dans cet article n'engagent pas le CNAM.
Les références originales de cet article sont : Gérard-François Dumont, « Les diasporas vénézuéliennes et leurs effets géopolitiques », Revue Géostratégiques, revue n° 67. Ce texte, ainsi que d’autres publications, peuvent être consultés sur le site de la Revue Géostratégiques de l’Académie de Géopolitique de Paris.
Notamment sous l’effet des possibilités démultipliées de mobilité et des technologies de communication, la question des diasporas prend, depuis les dernières décennies du XXe siècle, une importance géopolitique majeure.
Cela résulte ce que j’ai appelé un processus de « diasporisation », selon la définition suivante : « La ‘diasporisation’ signifie que des immigrants ou leurs descendants, quelles que soient les raisons de leur migration, et même lorsqu’ils ont la nationalité de leur pays de résidence, conservent des liens réels ou mythifiés avec leur pays-souche et développent des relations spécifiques avec des immigrants ou descendants d’immigrants ayant les mêmes origines géographiques, ethniques, linguistiques ou religieuses ». La diasporisation est un phénomène qualitatif mais il suppose des flux quantitatifs, soit l’existence d’immigrants et leurs descendants. Concernant le Venezuela, il importe donc d’abord de prendre la mesure de l’importance de l’émigration avant de s’interroger sur son évolution et ses effets géopolitiques.
Un dépeuplement incontestable…
Mesurer l’émigration vénézuélienne, comme d’ailleurs celle d’autres pays, y compris de pays considérés comme ayant un système statistique issu d’une longue histoire, à l’exemple de la France, n’est pas évident. Pour connaître, au fil des ans, la population du Venezuela vivant dans le pays, et donc estimer les flux migratoires, il faudrait dans l’idéal des recensements réguliers et récents, ce qui n’est pas le cas. Il faudrait également un enregistrement systématique des migrations résidentielles entre le Venezuela et le reste du monde. Or le Venezuela, comme la plupart des pays, ne dispose pas d’un tel outil statistique. L’une des possibilités est alors de recourir aux données estimatives, provenant de la Division de la population des Nations Unies.